Bruno Ribeiro : « Briser le 4e mur, ça m’obsède »

Bruno Ribeiro : "Briser le 4e mur, ça m'obsède"

En parallèle à la 52e numéro de notre newsletter éditoriale, dont il est le rédacteur en chef invité, Bruno Ribeiro se prête ici à l’exercice de l’interview. Depuis les États-Unis, où il multiplie les allers-retours ces derniers mois, le Parisien dit tout : son processus créatif, les raisons qui l’ont incité à adapter Matrix en projection immersive, son amour pour la musique, son rapport distant au cinéma, qu’il juge trop élitiste, son besoin de connexion humaine et son envie inassouvie de briser le quatrième mur. Un entretien finalement à l’image du bonhomme : dense et passionné.

J’imagine que ta présence en Californie est liée à la première de Matrix en version immersive à COSM ?

Bruno Ribeiro : Tout à fait ! C’est un projet qu’on a commencé avec Jay Rinsky de Little Cinema et COSM il y a à peu près deux ans, avec l’envie de proposer une nouvelle expérience à partir de films existants. Avec la technologie dont dispose COSM, on s’est rendu compte que l’on était capable de transformer un film 16/9 en une expérience immersive dans laquelle le public ne se contente plus de regarder mais se retrouve littéralement dans les décors du film.

Le risque, c’était d’entrer en compétition avec le film, de prendre le dessus, et donc de détourner le regard du public. Or, par respect pour le matériel originel et le travail des réalisateurs du film que l’on réinterprète, le plus pertinent était de travailler avec lui, d’en faire l’élément principal, d’être dans un dialogue permanent, comme si le long-métrage était le chanteur et que l’on créait autour de lui une scénographie évolutive et modulaire.

Par quelles réflexions es-tu passé pour parvenir à un tel résultat ?

Bruno Ribeiro : Il y a d’abord eu un gros travail d’écriture et de tests avec les équipes de COSM. Ensuite, il a fallu répertorier les scènes qui constituent un point marquant dans l’histoire, celles qui méritent ou non qu’on appuie l’idée d’une immersion, etc. Comme on travaille avec des images en très grosse résolution, on était obligé d’arbitrer très vite les scènes à traiter en profondeur et celles où on pouvait se permettre d’être plus abstraits. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, on ne s’est pas focalisé sur les scènes d’action les plus dynamiques. Par exemple, lorsque Morpheus propose à Néo de choisir entre la pilule rouge et la pilule bleue, c’est un moment très calme, mais la scène est tellement iconique que ça nous semblait important de recréer l’endroit où ils se trouvent à ce moment-là. Ainsi, on a l’impression d’être dans le décor, avec eux, dans une ambiance presque atmosphérique. 

Extrait du film "Matrix" en projection immersive.
Matrix ©COSM/Little Cinema/Tod Seelie

Le principal défi a donc été de trouver l’équilibre entre les moments spectaculaires visuellement et d’autres plus contemplatifs ?

Bruno Ribeiro : En quelque sorte, oui. Mais tout s’est organisé assez naturellement, selon des astuces héritées de tous ces concerts sur lesquels j’ai pu bosser ces quinze dernières années. Par exemple, il suffit parfois de flasher des lumières dans des décors en 3D pour accentuer un coup de poing ou un coup de feu. Tout est une question de dosages dans les effets.

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« La présence d’une mélodie, c’est vraiment ce qui va te faire pleurer ou te faire réagir de façon épidermique.  »

C’est intéressant de t’entendre comparer ce travail à celui réalisé pour le monde de la musique. Je me trompe peut-être, mais j’ai la sensation que, malgré tes études de cinéma à Paris 3, la musique est la forme artistique qui occupe le centre de ta pratique.

Bruno Ribeiro : C’est vrai que je pense toujours à la musique en premier quand je commence un projet. C’est une manière de me mettre des contraintes d’emblée, mais aussi d’imaginer un espace en tant que tel. J’ai pris l’habitude de dire que j’essaye de matérialiser le son. Alors, quand je crée des installations pour des concerts ou des expositions comme Clubbing au Grand Palais Immersif, le son me sert de fil directeur et narratif. Tout simplement parce que le son est pour moi le principal vecteur d’émotions. Bien sûr, tu peux raconter une histoire et toucher une corde sensible avec des images, mais la présence d’une mélodie, c’est vraiment ce qui va te faire pleurer ou te faire réagir de façon épidermique. Soudain, il n’y a plus de filtre. Tu écoutes une chanson, et tu sais directement ce que tu ressens.

Extrait du film "Matrix" en projection immersive.
Matrix ©COSM/Little Cinema/Tod Seelie

Penses-tu tout de même que tes études de cinéma t’ont permis d’avoir une approche atypique, aussi bien sur le plan visuel que narratif, de la scénographie ?

Bruno Ribeiro : C’est sûr que ça m’a appris à sous-tendre chacun de mes projets d’une réflexion, mais aussi à comprendre le sous-texte de l’art et des films auxquels je m’expose. Cela dit, l’art qui me plaît le plus est moins narratif que sensoriel. Je ressens nettement plus d’émotions devant quelque chose que je ne comprends pas vraiment que devant un film où le propos est clair de A à Z. Attention, tous mes projets ont une histoire, mais celle-ci n’est pas nécessairement intelligible, ce qui me permet finalement de toucher à quelque chose de potentiellement universel. C’est sans doute aussi une réaction à ces études dont je me suis lassé. Je trouvais ce monde trop élitiste, davantage tourné vers l’analyse que vers la pratique.

On pourrait aussi faire ce reproche au monde de l’art numérique… Quand tu te lances en tant que VJ au croisement des années 2000-2010, tu as la sensation de pouvoir être plus spontané ?

Bruno Ribeiro :  C’est surtout qu’il n’y avait pas d’argent, donc on pouvait faire ce qu’on voulait (rires). C’était un truc de jeunesse où je samplais des films en me focalisant sur les passages les plus intenses et violents, je les remontais et je les projetais dans des soirées pour accompagner un DJ qui jouait de la techno très forte. Il y avait l’envie de choquer, de faire des choses très viscérales et de permettre au public de se prendre un truc fulgurant en pleine tête. L’image devenait alors une expérience augmentée, fusionnant avec la musique, dans une recherche d’intensité.

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« Je ressens nettement plus d’émotions devant quelque chose que je ne comprends pas que devant un film où le propos est clair de A à Z. »

Aujourd’hui encore, je suis avant tout impressionné par des projets qui vont être hyper intenses en termes d’expérience. Le travail de Kurt Hentschläger, par exemple, a été l’une des premières claques que je me suis prise via l’art vidéo. Depuis, j’essaye d’y rester fidèle d’une manière ou d’une autre, en ramenant du jeu et de l’accident, en me créant des problèmes dont je n’ai pas besoin lors du processus de création.

D’où, j’imagine, ce côté touche-à-tout…

Bruno Ribeiro : Clairement ! C’est une manière d’aller vers des choses que je ne sais pas toujours faire, de proposer de l’inédit et de voir si ça se casse la gueule ou pas. Le son, l’image, la scénographie, les installations, le mapping… J’ai besoin d’aborder des projets selon différents angles, de collaborer avec différentes équipes, de proposer différents formats et d’utiliser différents médiums. C’est une manière de rester éveillé et excité par ce que je fais. Avec, toujours, la physicalité du son et la recherche de l’immersion comme trames narratives.

GIF en noir et blanc de la chorégraphe Katia Petrowick.
NO BODY ©Bruno Ribeiro

Qu’est-ce qui te plaît tant dans cette recherche d’immersion ?

Bruno Ribeiro : C’est l’idée de créer des expériences, de petites interzones dans lesquelles les gens entrent et interagissent. C’est une façon pour moi de travailler sur la perception du corps, du son, de la réalité. Briser le 4e mur, c’est quelque chose qui m’obsède. Aujourd’hui, on retrouve d’ailleurs cet attrait avec Matrix, dans des scènes où on a parfois l’impression de voir le film depuis le point de vue de Néo. Il y a aussi ce moment, au début du film, où Trinity se fait poursuivre et saute de bâtiments en bâtiments. Pour cette scène, on a décidé d’ouvrir les bâtiments en deux et de donner l’impression d’être au cœur d’une sorte de maison de poupées, comme pour troubler le rapport d’échelle entre le dedans et le dehors, les éléments miniatures et les éléments grandioses.

Quand tu collabores avec la danseuse et chorégraphe Katia Petrowick sur NO BODY, en 2010, c’est déjà dans cette idée de créer des expériences immersives et interactives où le mouvement déclenche l’œuvre ?

Bruno Ribeiro : Il y a déjà cette idée de travailler autour du corps, de jouer avec via ce synthétiseur humain que je filme en train d’exécuter plusieurs chorégraphies et que j’associe ensuite à un son. À ce moment-là, je suis à fond dans ce que proposent dans leurs vidéos Chris Cunningham et Aphex Twin. Il y a cette approche héritée du sample et du remix, que l’on retrouve d’ailleurs dans Cellulo/d, où je confronte le film des frères Lumières aux hallucinations de l’IA. Il y a aussi ce rapport à l’accident, au glitch. N’ayant pas fait d’études d’art après Paris 3, je pense que je me retrouve dans ce processus très DIY, autodidacte.

Reproduction en IA du film "L'arrivée d'un train en gare de la ciotat”.
Cellulo/d ©Bruno Ribeiro

Cela fait plus de quinze ans que tu es actif. Tu penses encore avoir cette même approche ou le fait de travailler sur de gros projets, comme la Fête des Lumières à Lyon ou encore Aura Invalides, a profondément changé ta méthode de travail ?

Bruno Ribeiro : Aujourd’hui, j’ai un atelier dans le 11ème arrondissement, je bosse avec une petite équipe autour de moi et je suis parfois missionné sur des projets au budget très conséquent. C’est évidemment plus cadré, voire même rigoureux, mais je garde cette spontanéité dans mes choix de projets. C’est cette instantanéité qui m’a plu originellement. Là où le cinéma nécessite d’avoir des producteurs, de réunir des acteurs ou autre, l’art numérique offre cette possibilité d’apprendre à créer via des forums, de télécharger des logiciels crackés, de sampler des films existants et de tout faire depuis son ordi. Comme il n’y avait pas beaucoup de personnes à proposer de telles œuvres il y a une quinzaine d’années, il y avait en plus le sentiment de faire partie d’une communauté. C’est hyper excitant !  

BrunoRibeiro
« L’art numérique offre cette possibilité d’apprendre à créer via des forums, de télécharger des logiciels crackés, de sampler des films existants et de tout faire depuis son ordi.  »

Ta création est aussi régulièrement collaborative. Comment naissent des projets comme ceux avec Muse et Damso ? C’est très libre ou au contraire, très cadré ?

Bruno Ribeiro : Pour Muse, j’ai travaillé sur ce projet alors que j’étais encore chez Moment Factory. C’était une collaboration avec Jesse Lee Stout, qui faisait office de directeur de création. Moi, je m’occupais de la réalisation de la partie visuelle et interactive. C’était vraiment un gros travail d’équipe entre tous les corps de métier, car il fallait à la fois produire les visuels et développer tout un dispositif interactif. L’idée, c’était de permettre aux membres du groupe d’interagir en temps réel sur la scène à 360°, installée au centre de l’Arena et aussi d’interagir avec certains types de contenus pendant le concert.

Matthew Bellamy est un artiste qui a une vision très claire de ce qu’il veut, et qui abordait ce projet presque comme un opéra rock. Il y avait une trame narrative forte, un arc avec un personnage récurrent qui évoluait tout au long du spectacle. La scène se trouvait au centre de l’Arena, augmentée d’écrans transparents permettant au public, même sur les côtés, de voir les contenus projetés. Et comme c’était la tournée Drones, il y avait bien sûr des drones qui participaient à des chorégraphies aériennes, embarquant eux aussi des éléments lumineux. On devait donc composer avec les trois dimensions  X, Y, Z  dans notre création.

En fonction des différents tableaux du concert, on produisait des contenus vidéo spécifiques. Par exemple, sur un morceau intitulé « The Handler », qui met en scène une figure de marionnettiste, Matthew voulait apparaître comme contrôlé par des mains géantes. On a donc développé tout un système de projection avec des mains animées, qui interagissaient avec ses mouvements. On a dû faire pas mal de tests, créer de nombreux rendus, pour que l’illusion fonctionne.

C’était passionnant, car ça mélangeait plusieurs disciplines : du développement, du design visuel, de l’implantation technologique. Notamment avec le système Black Trax, qui permet de faire du tracking, et qui est aussi utilisé pour synchroniser certaines lumières avec les déplacements sur scène. L’intégration technique sur place,  pendant la résidence de création, était un moment crucial, où toutes les pièces du puzzle devaient s’assembler. On a fait des ajustements jusqu’à la veille de la première, qui avait lieu à Mexico.

Le groupe de musique Muse au centre de la scène, entouré par des projections lumineuses et immersive.
Muse – Drones Tour ©Moment Factory

Quid de Damso ? 

Bruno Ribeiro : Quelques années plus tard, j’ai travaillé avec Samuel Châtain, qui était à la fois light designer et scénographe. Il m’a proposé de collaborer avec lui sur la direction artistique visuelle du concert de Damso. C’était un projet organique. J’étais en contact direct avec Samuel et Damso, pour commencer à écrire les différentes pièces de son univers visuel. On a enchaîné pas mal de réunions, de rendez-vous, d’appels, pour construire progressivement une direction artistique inspirée de sa discographie. En fonction de ce qui lui plaisait, on assignait tel concept visuel à tel morceau.

En parallèle, on a travaillé avec Samuel sur la mise en lumière des tableaux, sur la manière d’amplifier certains effets. Il y avait aussi une envie de jouer parfois sur des rendus proches de l’holographie. Samuel a conçu une scénographie à base de LEDs transparentes, qui permettaient de créer des effets de profondeur et de volume très immersifs.

Le rappeur Damso face à son public pendant que des projections lumineuses diffusent ses paroles en arrière-plan.
Damso – QALF Tour ©Joey Metra

Cette approche de la scénographie semble tout de même héritière de ton goût pour le langage cinématographique, non ?

Bruno Ribeiro : Quand je crée mes installations, je les conçois toujours avec une approche cinématographique, notamment dans l’aspect narratif. Ce que j’aime, c’est inventer ces interzones où les gens peuvent entrer, explorer, interagir, comme s’ils pénétraient eux-mêmes dans un film. J’ai toujours eu cette envie de faire déborder la fiction sur la réalité.

Par exemple, sur mon installation All is Well pour le festival Noor Riyadh, j’ai voulu créer l’illusion qu’un puits de pétrole pourrait s’animer la nuit, comme s’il extrayait de la lumière du sol. On a fait construire une structure monumentale en acier, de plusieurs tonnes. Autour de lui, une chorégraphie lumineuse se déployait, contrôlée via Ableton Live , avec une bande-son que j’ai composée spécialement pour l’installation. L’idée était de détourner ce symbole industriel, pour en faire une source poétique, presque surnaturelle, faire jaillir de la lumière là où l’on s’attendait à trouver du pétrole.

Il y avait une démarche similaire avec Vibrance, un projet interactif qui traduit la voix en lumière. On voulait inviter les gens à s’approprier l’œuvre en générant, avec leur propre voix, une chorégraphie lumineuse. Il y a cette envie de créer des moments de connexion, de permettre aux gens d’interagir entre eux ou simplement de se croiser dans l’espace. L’installation devient un lieu de passage, où le public est partie prenante de l’œuvre, par sa seule présence, son mouvement.

Dans la nuit, une structure monumentale en acier semblable à un puits de pétrole.
All Is Well ©Bruno Ribeiro

Ce qui t’attire, c’est donc cette dimension expérientielle et physique ?

Bruno Ribeiro : Clairement ! Ça, et la création d’un espace-temps que le public peut s’approprier pleinement. J’ai été très influencé par des spectacles immersifs comme The Burnt City ou Sleep No More de Punchdrunk. On entre dans un univers, et on se retrouve absorbé dans une narration, une fiction vivante. Quand je conçois une installation, je pense souvent à ça. À cette possibilité de créer une proposition singulière, qui permette aux gens de se projeter, de vivre quelque chose de personnel dans un cadre collectif.

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« J’avoue avoir toujours besoin, quand une idée me vient, de pouvoir la dessiner.  »

Étant donné que tu multiplies les projets, la question se pose : dans la vie de tous les jours, es-tu du genre à te lasser assez vite ?

Bruno Ribeiro : Ce n’est pas que je me lasse, c’est juste que j’aime tester de nouvelles choses. Si je le pouvais, j’aimerais pouvoir tout faire en même temps (rires). Ça me permettrait peut-être d’avoir un style plus marqué, plus identifiable…

C’est quelque chose qui t’obsède, le style, l’identité visuelle ?

Bruno Ribeiro : C’est étrange, parce que j’ai envie de répondre oui alors que je ne maîtrise aucun logiciel à 100% et que je sais à peine dessiner, même si tous mes travaux se matérialisent d’abord sous cette forme. Mais peut-être qu’au fond, mon style est ailleurs. Il est dans cette recherche de chaos et de sérendipité, dans ce travail sur la perception et sur la représentation du corps, dans ces gestes invisibles qui vont être moteur d’une œuvre, dans cette volonté de me laisser guider par les avancées technologiques.

Éclairé par divers néons au sol, un cadre lumineux apparaît et laisse deviner la présence de personnages glitchés.
Vibrance ©Bruno Ribeiro

Tu dis commencer chaque projet par un dessin. Malgré les possibilités du numérique, tu as donc besoin de conserver une forme de matérialité ?

Bruno Ribeiro : J’avoue avoir toujours besoin, quand une idée me vient, de pouvoir la dessiner. Je ne sais pas vraiment dessiner, mais je fais des gribouillages… qu’il n’y a que moi qui comprends, en fait. Mais je trouve que, parfois, il y a quelque chose de très important dans le fait d’avoir une interface directe entre ce que j’ai dans la tête et ce que je pose sur le papier. Passer par un ordinateur ou une tablette numérique, ça peut me distraire, me sortir de l’inspiration initiale.

Du coup, très souvent, je fais de petits croquis, un peu spontanés, qui deviennent une première ébauche du projet à venir. J’ai toujours un peu ce besoin, cette impulsion de prendre un stylo dès que l’idée surgit, pour la fixer sur le papier. Ce geste me permet aussi de maintenir une forme de physicalité, une relation au temps : j’aime bien me dire que l’idée, dans sa toute première forme, c’est ce petit dessin fait sur un bout de papier, un morceau de nappe ou de serviette, un truc qui traînait.

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« Créer un studio, c’est affirmer aussi que l’outil n’est jamais une finalité. Ce qui compte, c’est l’expérience, la recherche, la collaboration.  »
Des spectateurs, dans la nuit, face, à 48 colonnes lumineuses.
48 Pillars ©Bruno Ribeiro

Aujourd’hui, tu t’apprêtes à fonder ton propre studio, Stroboscope ? C’est, là encore, dans l’idée d’aller encore plus loin dans le processus collaboratif, en montant des projets aux côtés d’artistes ou spécialistes avec lesquels tu collabores ces dernières années ? 

Bruno Ribeiro : L’idée, c’est effectivement d’aller plus loin dans le processus collaboratif, mais aussi parce qu’avec le temps, j’ai commencé à construire un réseau de personnes avec qui je travaille régulièrement. Il y a une envie de continuer à développer des projets ensemble, et aussi d’avoir accès à d’autres types d’opportunités. Je me suis rendu compte que structurer ce travail sous la forme d’un studio était plus en accord avec mes aspirations, avec la manière dont j’ai envie de faire évoluer ma pratique artistique, mais aussi de repenser ma place dans les industries créatives. Il y a cette volonté de pouvoir porter des projets plus ambitieux, de franchir un cap.

C’est pour ça qu’on lance Stroboscope. On va voir comment ça évolue, mais l’idée, c’est d’avoir un studio modulaire et polyvalent dans sa façon de fonctionner et de créer. J’ai envie de rassembler des talents venus de différents horizons, et de pouvoir constituer des équipes sur mesure, en fonction de la nature des projets. Ça permet d’être davantage en accord avec ma manière de penser : partir d’une idée, d’un design, d’un besoin artistique ou technologique, plutôt que d’appliquer systématiquement la même méthode ou les mêmes outils à chaque projet. D’où cet aspect pluridisciplinaire qui fait vraiment sens pour moi. Créer ce studio, c’est affirmer aussi que l’outil n’est jamais une finalité. Ce qui compte, c’est l’expérience, la recherche, la collaboration. Et Stroboscope va justement permettre de réunir des compétences variées selon les projets, pour aller plus loin, continuer à inventer des formes, à explorer des espaces, et à faire émerger de nouveaux récits.

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