Avec EXIT, son studio de design immersif, Ceren Arslan s’approprie les architectures monumentales des civilisations modernes ou non, qu’elle transforme avec talent en récits sensoriels.
Un mur rouge cramoisi, un escalier comme une brûlure sucrée, un sol vert mousseux…. Chez Ceren Arslan, chaque image est une sensation. Architecte et designer installée à New York, la jeune femme représentée par le studio Braw Haus construit des espaces qui ne cherchent pas tant à être habités qu’à être ressentis. Fondé en 2020, son studio EXIT porte bien son nom : il est cette sortie douce vers l’imaginaire, une échappée belle qui transforme le banal en poésie visuelle.
Le sentiment avant la fonction
Formée à l’architecture classique, passée par les studios Kelly Wearstler, KPF ou encore SHoP Architects, Ceren Arslan est animée d’un désir viscéral de fiction et pose, à travers sa pratique protéiforme, une question simple : et si le design n’était pas une solution, mais une émotion ? Ses projets naissent ainsi d’un ressenti brut, une couleur, un lieu, un vertige, qu’elle traduit ensuite en volumes, textures et lumières. Dans l’univers d’EXIT, l’escalier n’est plus un simple moyen de monter : c’est un « Red Velvet Stair Brûlée », épais et rouge comme un dessert incandescent. Une piscine vide devient « Everything but the pool », éloge silencieux d’un été qui n’a jamais eu lieu. Les titres eux-mêmes racontent une histoire, tandis que chaque pièce se transforme en un poème, en un souvenir recomposé.
Déranger la logique des choses
Malgré une pratique ancrée dans le béton, Ceren Arslan réussit à créer des projets qui flirtent doucement avec le rêve. Ni tout à fait réalistes, ni totalement virtuels, ils se situent dans un entre-deux étrange et familier. Les couleurs sont franches, les matières presque comestibles, si bien qu’il se dégage de ces images une tension délicate. Ce que l’on voit semble tangible, mais quelque chose résiste. Une fenêtre qui n’ouvre sur rien. Un lit sans chambre. Un détail qui dérange la logique.
« Ma philosophie créative s’articule autour de la narration, confie-t-elle dans une interview donnée à STIR. C’est au cœur de mon travail que je relie le design à une narration et que je raconte l’architecture avec humour. C’est l’essence même de mon travail : je murmure presque au public ce qu’il voit, car cela m’aide à saisir ce que raconte mon œuvre ». Une esthétique de l’histoire, donc, mais aussi de la faille, de l’imperfection discrète. Sans, jamais, se prendre au sérieux.