Artiste pluridisciplinaire écossais, Douglas Gordon refuse le choix d’un médium unique. Au contraire, c’est à travers la vidéo, le dessin, la sculpture et l’installation qu’il explore les moindres recoins de la condition humaine, ainsi que les tensions qui régissent le monde contemporain.

1993 : Création de 24 Hour Psycho
Alors jeune artiste, Douglas Gordon s’inspire de l’un des monuments signés Alfred Hitchcock pour frapper un grand coup. Version (très) ralentie du classique Psycho, son film propose deux images par seconde au lieu de vingt-quatre afin de créer un film d’une journée entière. Une façon pour l’artiste de proposer un nouveau regard sur une œuvre emblématique du 7ème art, devenue presque archétypale à force d’être plagiée, découpée, citée. Projeté dans divers espaces d’exposition, parmi lesquels le MoMA en 2006, le 24 Hour Psycho propose une réflexion sur le temps, mais aussi sur la frustration à une époque où, déjà, l’homme cherchait une forme de divertissement immédiate.

1996 : Obtention du Turner Prize
En 1996, Douglas Gordon devient le premier artiste vidéo à remporter la prestigieuse récompense, symbole de l’acceptation progressive des médias audiovisuels – et leur portée créative indéniable – au sein du monde de l’art contemporain. Pour le journaliste Richard Dorment du Daily Telegraph, la nomination de Douglas Gordon est à cet effet plutôt évidente : « Le fait que Douglas Gordon, le lauréat, réalise des installations vidéo spectaculaires qui s’inspirent du cinéma, de la littérature et de la psychologie est symptomatique de l’évolution de l’art britannique… Je ne vois pas comment un peintre aurait pu avoir la moindre chance », clamait-t-il peu après la remise du prix.

2000 : Coréalisation de Vicinato II avec Philippe Parreno
Vicinato II, de Douglas Gordon et Philippe Parreno, prolonge le dialogue amorcé avec Vicinato, un film collaboratif qui explore la création artistique à travers le dialogue. En transformant une conversation d’artistes de la fin des années 1990 en matière cinématographique, le film, tourné en couleur et porté par quatre acteurs, explore la création collective tout en brouillant les frontières entre documentaire, fiction et performance. Ou comment faire de la parole un véritable espace de création.

2008 : Rétrospective au MoMA
Consacrée à la carrière de Douglas Gordon, Douglas Gordon : Timeline est la première rétrospective d’envergure consacrée au travail de l’artiste écossais, laquelle avait pour intention d’explorer son obsession pour le temps, le cinéma et la mémoire. En 2008, l’exposition mettait ainsi en lumière ses expérimentations majeures (dont 24 Hour Psycho, évidemment) et révélait la manière dont Douglas Gordon prend plaisir à détourner les codes narratifs pour invalider nos repères visuels et sonores.

2025 : Rétrospective au MAXXI
Présentée au MAXXI, à Rome, Douglas Gordon : Pretty much every film and video work from about 1992 until now’ish… prend la forme d’une installation immersive XXL de presque toute la production en film et vidéo de l’artiste depuis 1992. Conçue comme un dispositif d’archive visuelle et sonore, l’exposition rassemble des écrans montrant simultanément plusieurs œuvres (certaines avec audio, d’autres sans) et instaure une dynamique de tension entre la répétition, le ralentissement, le jeu de miroir et le décalage. Une véritable mise en lumière de la méthode de Douglas Gordon, que l’on serait tenté de résumer ainsi : détourner, fragmenter, recomposer l’image pour interroger la mémoire, le temps et l’absurdité humaine.