La chanteuse islandaise Björk ressuscite son avant-dernier albumVulnicura, publié en 2015, grâce à la réalité virtuelle. Une expérience immersive pensée dans l’idée de réinventer la performance scénique en un pèlerinage au cœur de ses cicatrices.
À Reykjavik, le 6 septembre 2025, une avant-première flamboyante avait lieu : la promesse de bientôt « vivre » un concert dans l’intimité de son casque. En présentant cette réédition de Vulnicura, opérée par PulseJet Studios pour Meta Quest et Apple Vision Pro, la chanteuse islandaise Björk prolonge aujourd’hui une œuvre amorcée en 2015 et lui offre une toute nouvelle dimension.
Lorsque l’on s’équipe du casque nécessaire au bon déroulé de l’expérience en réalité virtuelle, le silence est d’une densité troublante. D’emblée, nous voilà projetés sur le seuil d’un concerto intérieur, prêts à visionner une éclipse du réel. L’Islandaise ne chante plus face à nous, mais autour de nous. Ses murmures, ses craquements, ses fragments de voix glissent dans l’espace, tandis que les morceaux s’offrent à nous comme une géographie de peines et de renaissances.
Réparer la blessure par les images
Déjà, dans Vulnicura, l’album, Björk mettait en musique ses tensions amoureuses, sa rupture, son deuil, jouant la dissonance et l’arrangement sophistiqué pour conjurer le chaos. Avec la VR, cette alchimie s’incarne autrement : le monde devient organique, le souffle du vent perce les parois de l’âme et les paysages d’Islande se tordent. Dans « Stonemilker », on la voit chanter sur une plage balayée de neige et de vent, le visage et les cheveux noyés dans la brise, tandis que la caméra explose en 360°, et nous pose là, dans une sorte d’état flottant autour d’elle. La séquence « Family », elle, met en scène ses mains libres dans une succession de gestes rendus tangibles grâce à la virtualité, que ce soit tirer des fils, recoudre un cœur qui vacille ou renouer les liens défaits lors d’une rupture.

Une communion virtuelle
Alors oui, l’expérience n’est pas parfaite. On peut pointer du doigt la lenteur du téléchargement, des gestes mal reconnus, un framerate parfois instable. Oui, le désir d’immersion se heurte encore aux franges techniques. Mais dans les instants où tout s’aligne, l’émotion nous cueille. On ne visionne pas, on vibre. Dans ce concert sans scène, Björk n’occupe pas la place classique d’une artiste face aux spectateurs. Elle s’insinue dans notre espace mental, nous invite à une communion sans décor, sans public, sans masque. Ainsi, dans ces moments-là, Vulnicura VR devient une sortie de confession rendue visible, un spectacle de silences où le spectateur se fait confident.
- L’album/DVD live Cornucopia est disponible.