En 1989, bien avant que la VR ne soit mainstream, l’artiste franco-américaine Nicole Stenger imagine le tout premier film immersif de l’histoire : Angels. Récit.
Nous sommes au crépuscule des années 1980. La réalité virtuelle connaît un véritable essor technologique, mais reste cantonnée à un milieu de passionnés. Nicole Stenger est artiste. Elle n’est ni ingénieure, ni programmeuse, mais travaille à l’époque en tant qu’animatrice 3D à Paris.
C’est au sein de la capitale française, dans la queue d’une conférence tech, qu’elle fait la connaissance de Jaron Lanier, qui dirige alors avec Tom Zimmermann VPL Research, la toute première entreprise à développer des univers virtuels, ainsi que les outils pour y évoluer. Grâce à lui, Nicole Stenger devient l’une des pionnières de la réalité virtuelle avec ce qui est communément admis de considérer comme le premier film immersif de l’histoire : Angels (1989-1991).
La France, à l’avant-garde
Avec Angels, qu’elle développe au MIT, puis affine à l’HitLab de Seattle, l’artiste offre son interprétation du paradis : « Lorsque j’ai chaussé pour la première fois un casque de réalité virtuelle, j’ai pensé que l’on devrait représenter et faire visiter le paradis. Je voulais rendre le plus grand public possible cette nouvelle forme artistique (…) Nous étions les premiers à utiliser cette technique », rapporte-t-elle au micro de la radio Deutschlandfunk Kultur. Équipé d’un casque de VR et du gant haptique développés conjointement par Jaron Lanier et Thomas Zimmermann, le spectateur s’approche d’un carrousel où dansent et chantent des pyramides aux couleurs vives – les cœurs d’ange.
Il suffit alors de les toucher pour déclencher l’apparition de trois espaces, qui abritent chacun une nouvelle expérience. Pour la première fois un film fait appel à la vue, à l’ouïe, mais aussi au toucher grâce au DataGlove. Conséquence : Angels fait le tour des festivals, mais n’y reçoit qu’un accueil poli. La faute à une projection sur des écrans 2D, les casques et les gants étant encore hors budget pour les festivals… Malheureusement, le cas de Nicole Stenger confirme une terrible vérité : il n’est jamais facile d’être à l’avant-garde.