Diffusé le 22 août, sous le dôme de la Satosphère, à Montréal, Metaract est la dernière collaboration de Manami Sakamoto et Yuri Urano : un projet qui questionne les possibilités permises par deux technologies de l’information particulièrement prisées au sein de l’art digital.
Le sujet paraît technique. Il n’en est pas moins passionnant, et se révèle même nécessaire : apprendre à faire la distinction parmi les outils à disposition, comprendre les possibilités offertes par chacun, parvenir à faire clairement la différence entre l’analogique et le numérique.
Quand le premier est né avec le début de l’électricité, et consiste à reproduire le signal à enregistrer (audio, vidéo…) sous une forme relativement fidèle à l’original, telle une onde radiophonique ou une captation par caméra, le second est apparu avec l’ère informatique. L’idée ? Convertir dans une suite de « 0 » et de « 1 » le signal analogique, désormais entré dans le système binaire du numérique.
Art organique
Aujourd’hui, le travail mené par Manami Sakamoto et Yuri Urano permet de comprendre toujours mieux les liens qui existent entre le numérique et l’analogique. Lors d’une résidence à la SAT, les deux comparses ont en effet cherché à rendre visibles les coulisses de leur travail en tant qu’artistes utilisant ces deux technologies : « À mon sens, explique Manami Sakamoto, l’analogique est organique et aléatoire, tandis que le numérique est calculé, structuré et aligné avec des bords nets et tranchants. » Ce serait donc si simple ? Évidemment que non.
Aguerries aux collaborations avec des boîtes de nuit et l’univers de la techno, les deux Japonaises montrent en quoi le numérique n’annule pas l’analogique. Au contraire, elles se complètent : « Nous pensons que les deux, bien que contrastés, sont nécessaires l’un à l’autre et doivent coexister. Et nous pensons que cela s’applique aux différentes formes de communication dans la société humaine. Metaract utilise comme textures des éléments naturels filmés et enregistrés en direct, crée des éléments organiques qui ne peuvent pas être générés uniquement par ordinateur, et les superpose avec des bruits et des particules créés en 3DCG pour donner un sentiment d’inconfort et de tension, ainsi qu’une ligne temporelle particulière. C’est un monde qui ne peut être créé que par la fusion des deux. »
Sur sa lancée, Manami Sakamoto poursuit : « À travers ce travail, nous espérons exprimer non pas la différence entre l’analogique et le numérique, mais la possibilité de fusion, un « monde de coexistence ». » Ainsi, l’enjeu a été de traduire sous forme d’images non pas explicites mais oniriques les caractéristiques de chacune. En résulte une série de films immersifs, indéniablement beaux, projetés lors du festival MUTEK (mais avec des entrées indépendantes). Le projet s’appelle Metaract et se veut être un regard aussi réflexif que crucial sur les ressorts des outils qui agitent l’art contemporain.
- Metaract, projeté le 22 août 2023 à 19h et 21h à la Satosphère de Montréal
- Découvrir le travail de Manami Sakamoto et de Yuri Urano