Les températures baissent, les feuilles tombent et le Festival d’Automne rempile pour une nouvelle édition parisienne. Déployé dans toute la capitale, l’événement installe une partie de sa programmation au CENTQUATRE-Paris, où l’on découvre From Sea To Sky, une installation multimédia née de la collaboration entre trois collectifs militants.
Spécialement conçu pour le CENTQUATRE-Paris et l’événement, From Sea To Sky invite les spectateurs à réfléchir sur la transformation progressive de l’espace maritime méditérannéen en une zone militarisée. Entre patrouilles maritimes et large arsenal de surveillance aérienne, l’eau et le ciel allient leurs forces afin de repousser les personnes migrantes, qui tentent de prendre la mer, aussi hostile soit-elle, en quête d’une vie meilleure. En analysant une multitude de données et d’images aériennes, trois collectifs militants tentent d’alerter les publics sur une guerre discrète qui se joue en eaux troubles.
« Il y a le ciel, le soleil et la mer… »
Les trois collectifs en question ne sont autres que LIMINAL (laboratoire d’investigation sur les violences aux frontières), Border Forensics (organisation enquêtant sur ces violences à l’aide d’analyses spatiales et visuelles) et Forensic Oceanography, créé pour enquêter « de manière critique sur le régime frontalier militarisé imposé par l’Europe à travers la mer Méditerranée ». Complémentaires, ils mettent aujourd’hui leur savoir-faire en commun dans l’idée de témoigner des méthodes meurtrières déployées en mer, qui ont fait plus de 40 000 morts ces dernières années.
Victimes de ce que Forensic Oceanography appelle la « violence liquide », ces demandeurs d’asile sont aujourd’hui honorés dans un ensemble immersif construit autour de deux grandes œuvres vidéo. Comprenant également une pièce sonore, des œuvres multimédias et cartographiques permettant de décortiquer l’expérience de celles et ceux qui traversent « la route migratoire la plus meurtrière du monde », l’installation est également rythmée par deux performances de Lawrence Abu Hamdan.
Intitulé Zifzafa – d’après un mot arabe évoquant un vent particulièrement fort -, le spectacle imaginé par l’artiste et chercheur libanais s’appuie à son tour sur une multitude de médias afin d’exprimer une réalité souvent minimisée dans les médias. Composition sonore et moteurs de jeux vidéo sont ici associés à une déclamation poignante qui plonge chaque spectateur au cœur d’un mouvement de résistance au colonialisme vert sur les hauteurs du Golan, territoire syrien occupé. De même que l’eau et le ciel, le vent devient dès lors un instrument de domination, privant des milliers d’habitants de la région de leurs terres…
- From Sea To Sky, de LIMINAL, Border Forensics, Forensic Oceanography, jusqu’au 03.11, CENTQUATRE-Paris.