Reconnu pour ses peintures lugubres, l’artiste russe Sanya Kantarovsky dévoile son premier film animé au CAPC de Bordeaux : A Solid House. Ou comment prendre du plaisir en se faisant peur.
Dans ses peintures, Sanya Kantarovsky multiplie les apparitions étranges, les visions d’horreur et créatures angoissantes, toutes droit sorties d’un film d’horreur. Il y a Uramado (2020), mettant en scène une femme fantôme aux longs cheveux noirs qui semble persécuter psychiquement un homme dans son sommeil. On se fascine aussi pour Leda (2020) et sa réinterprétation du fameux tableau de Dalí Leda Atomica. Surgissant du fond d’un étang, une figure apparaît dans le sillage d’un cygne : est-ce une sorcière, ou plus simplement un corps rendu effrayant, car sans vie ? À chaque fois, un même constat : les images de Sanya Kantarovsky, originaire de Moscou, ruissellent de scénarios macabres, suffisamment lugubres pour nous glacer le sang…
Animer pour mieux hanter
Avec A Solid House (2022), c’est la même ambition qui opère : repéré par le commissaire Cédric Fauq et rapidement diffusé à « Vidéodrame », programme du CAPC dédié à l’image en mouvement et au film d’artiste, ce long-métrage interpelle d’emblée par une triple faculté : réjouir, terrifier et témoigner de la diversification d’un artiste dont les oeuvres font écho à nos plus grandes angoisses.
Toute le talent de Sanya Kantarovsky, né en 1982, est en effet de se servir de l’épouvante et du surnaturel pour traduire des maux contemporains et des crises existentielles. Alliant humour noir et critique sociale, A Solid House exprime par exemple le sentiment d’étroitesse du milieu bourgeois et ses frustrations à travers un appartement aussi confortable que suffocant, symbolisée par cette créature étrange enfermée à l’intérieur. Tout se passe ainsi comme si la vidéo d’animation, en mettant en mouvement l’absence de mouvement, permettait d’amplifier ici l’effet de séquestration. Passionnés de ses toiles, on fonce.