Au KANAL-Centre Pompidou de Bruxelles, l’exposition Connecting explore les relations entre l’homme et la machine, et anticipe de nouvelles formes d’interdépendances.
Souvenez-vous de ce temps lointain où les outils numériques n’étaient qu’une extension du monde réel. Où plutôt que d’envoyer des courriers, nous rédigeons des emails. Où plutôt que de faire la queue en boutique, nous nous faisions livrer nos achats directement chez nous. Certes, cette utilisation d’Internet est toujours d’actualité, mais elle ne représente aujourd’hui qu’un tout petit espace de nos interactions avec le numérique.
C’est du moins l’état des lieux fait par le KANAL-Centre Pompidou à l’occasion de sa nouvelle exposition, Connecting, visible jusqu’au 3 décembre : « Le monde numérique continue sa construction là où le monde physique s’arrête, expliquent les équipes du centre culturel bruxellois. Les entités humaines et non-humaines s’y interconnectent, à l’image des cosmologies animistes qui reconnaissent depuis longtemps la vivacité et le potentiel des rivières, des montagnes, des animaux et des pierres. »
Entre interdépendance, mutation et émotions
En imaginant de nouvelles interdépendances entre humains et machines, l’exposition laisse la parole à huit artistes qui dissèquent ces nouveaux usages à travers une multitude de médiums. Chez Eva Lhoest, la vidéo se mêle ainsi à la sculpture au sein d’une œuvre s’intéressant de près aux réseaux de câbles déployés depuis le développement du télégraphe électrique. Installée dans l’escalier, l’installation reproduit dès lors une tresse de câbles emprisonnant nos corps, et questionne ainsi l’impact de la communication instantanée sur nos corps, nos cultures et notre notion de l’espace-temps.
L’œuvre Profundior de Zach Blas fait quant à elle le rapprochement entre l’IA, à qui l’on donne un statut quasi-mystique, et la religion. Son IA – nommée Lacrimae, soit « les larmes » en latin – ne se nourrit pas de faits comme c’est normalement le cas pour une intelligence artificielle, mais d’émotions humaines : matérialisées par des larmes, celles-ci coulent dans un bassin, semblable à un bénitier, où elles sont brassées et transformées en données. Autre travail ayant retenu notre attention, le jeu vidéo Morphogenic Angels du collectif Keiken (que l’on peut tester dans l’exposition) interroge la figure fantasmée du post-humain, modifié grâce à la morphogenèse, en plongeant le joueur au 3ème millénaire, dans un monde en évolution perpétuelle.
« Dans cette œuvre, nous confiaient-ils au printemps dernier, on imagine un futur où les humains auront été remodelés biologiquement par les sciences » Et si c’était ça, finalement, l’objectif de Connecting : inviter quiconque à imaginer le futur de l’humanité, une fois que les corps auront définitivement fusionné avec les technologies numériques ?