Il paraît que pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient. Un adage qui se vérifie au sein de l’histoire de l’art, qui n’a pas attendu l’arrivée de l’IA pour intégrer le numérique à son imposant corpus. La preuve avec les Oscillons de Ben F. Laposky qui, en 1953, ont érigé les mathématiques au rang d’art.
En 1950, le dessinateur, graphiste et mathématicien Ben F. Laposky utilise pour la première fois un oscilloscope dans l’idée de le combiner avec un générateur d’ondes sinusoïdales et divers appareils électroniques. L’objectif est simple, il s’agit tout bonnement de créer de l’art abstrait. À partir des vibrations électriques montrées sur l’écran de l’oscilloscope, l’Américain photographie ainsi des éléments sortis du contexte scientifique, lesquels seront considérés a posteriori comme les « premiers exemples d’infographies ».
Pluralité des ondes
Trois ans après ses premiers essais, Ben F. Laposky expose une cinquantaine de ces images au Musée Sanford, dans son Iowa natal, dans une série qu’il nomme Oscillons et qui acte dès lors son entrée dans la grande histoire. Considéré depuis comme le premier pionnier de l’art électronique (et plus particulièrement du médium vectoriel analogique), Laposky bricole les faisceaux électroniques affichés par le tube cathodique de l’oscilloscope qu’il photographie ensuite à l’aide d’une caméra à grande vitesse dotée de filtres de couleur. Résultat ? Des compositions uniques et esthétiques d’ondes électroniques jouant ce qu’il qualifiera lui-même de « musique virtuelle ». Succès immédiat pour l’exposition de Sanford qui sera par la suite déclinée dans plus de 200 lieux à travers les États-Unis et l’Europe.
Le cinétisme, les rapprochements faits avec la musique électronique et le caractère abstrait de ces compositions continuent d’ailleurs d’influencer de nombreux artistes. En tête de liste, citons notamment le graphiste anglais Peter Saville, dont la conception de la pochette de l’album Unknown Pleasures de Joy Division (1979) cristallise sans doute à elle seule l’impact de Laposky sur la génération qui lui succède.