À Karlsruhe, en Allemagne, le centre d’art et des médias, le ZKM, rend hommage à son célèbre dirigeant et pionnier des arts visuels et numériques, Peter Weibel, disparu le 1er mars dernier. Comment ? En dévoilant Renaissance 3.0, la dernière exposition dont l’homme a été le curateur.
Être « le Prado de l’art des médias », telle était l’ambition de Peter Weibel, artiste et ancien directeur du ZKM. « Quand vous allez au Prado, vous y voyez des peintures vieilles de cinq siècles. C’est ce que je veux faire : que les gens puissent voir l’art des médias dans trois cents ou cinq cents ans comme ils regardent la peinture aujourd’hui », déclarait-il en 2020 au journal autrichien Salzburger Nachrichten. S’il paraît difficile d’anticiper l’avenir, l’homme a du moins réussi à faire du centre d’art et des médias de Karlsruhe l’un des cœurs vibrants de la création numérique européenne.
Dernier exemple en date ? Renaissance 3.0, l’ultime exposition conçue par Peter Weibel. Présentée jusqu’au 7 janvier 2024, celle-ci invite 35 artistes à témoigner, chacun à leur manière, de cette nouvelle Renaissance artistique, issue comme la première de l’alliance des sciences et des arts – est-il utile de rappeler que, oui, Léonard de Vinci était lui aussi un grand scientifique ? Ainsi, Renaissance 3.0 rend compte de ce mariage artistique, de la façon dont les avancées technologiques (IA générative, réalités virtuelle et augmentée, impression 3D…) ont été embrasées par la sphère créative ces dernières années.
Un festival défricheur
Parmi les artistes invités, on note notamment la présence de Tomas Saraceno, connu pour son regard de chercheur sur les araignées. Ici, tout se passe grâce à des vibrations électromagnétiques émanant d’une immense toile d’araignée, encourageant les visiteurs à moins observer la toile qu’à la sentir, à l’entendre. Une démarche foncièrement différente de celle proposée par l’artiste et informaticien de formation Holger Förterer : dans Fluidum 2, l’Allemand s’amuse en effet de la présence du visiteur, dont l’ombre sert ici à déformer des nuages fractaux, générés en temps réel par des modèles IA, projetés sur un grand écran et évoquant tour à tour des flammes, des volutes de fumée, voire même des coraux.
Plus loin, c’est à l’artiste Constanza Piña Pardo qu’il est proposé de dévoiler aux visiteurs l’un des tout premiers ordinateurs écologiques : le khipu, un appareil fait de matières organiques, tels que la pierre, la laine, la céramique ou encore le coton, dont les fils servent à stocker différentes données sous la forme de nœuds. Une idée géniale, qui vient rappeler l’essentiel : la nature a décidément déjà tout inventé.
- Renaissance 3.0, jusqu’au 01 juillet 2024, ZKM, Center For Art and Media Karlsruhe, Allemagne.