À l’origine d’une tribune récemment publiée sur le site du Monde, l’artiste Refik Anadol et le fondateur du groupe d’investissement et d’innovation KKCG Karel Komárek font le plaidoyer d’une IA pas si déconnectée d’une certaine tradition artistique.
On ne vous apprendra rien si l’on vous dit que depuis son récent essor, l’intelligence artificielle fascine autant qu’elle inquiète, suscitant un grand nombre de questions chez les plus sceptiques. Les machines remplaceront-elles les humains ? L’IA peut-elle devenir hors de contrôle ? Le progrès est-il synonyme de la mort du savoir-faire, humain et artisanal ? Des interrogations pas si neuves qui accompagnent finalement chacune des grandes avancées technologiques, et qui bouleversaient déjà les foules lors de l’avènement d’Internet.
Partant de ce constat, les deux spécialistes préfèrent se concentrer sur les dialogues que nous pouvons entamer avec l’intelligence artificielle, rappelant dans une tribune pour Le Monde que « l’IA générative repose elle aussi sur l’interaction entre le passé et le présent. En puisant dans le passé de l’expression humaine – les grandes bases de données -, elle peut avoir des applications quasi universelles et faciliter l’innovation dans de nombreux domaines de la culture et de l’industrie. »
Se nourrir du passé
Hasard ou non du calendrier, cette coexistence homme-machine, ces échanges entre passé, présent et avenir sont également explorés au sein de l’exposition Défragmentation digitale, actuellement présentée à la Galerie Le 33 mai. En réunissant deux artistes, Art Now et Edouard Dullin, l’événement met en évidence les liens entre traditions et nouvelles technologies. Alors que l’artiste numérique Art Now se réapproprie les grands classiques de l’histoire de l’art à travers l’art génératif, le sculpteur Edouard Dullin imagine des œuvres en trois dimensions explorant l’influence du numérique sur nos corps et nos esprits.
On y voit là un écho à cette phrase de Refik Anadol et Karel Komarek : « On appréhende mieux l’art des nouveaux médias si on le considère comme un dialogue entre l’expérimentation et la tradition ». On y voit aussi un postulat à même de rassurer celles et ceux qui imaginent qu’un changement majeur de technique signifie nécessairement que l’on doit renier ce que l’on connaît déjà.