À l’occasion du 120e anniversaire de la disparition de Jules Verne, la 9e édition du festival amiénois décroche la Lune, et invite conjointement les spectateurs et les artistes numériques à explorer les étoiles.
Institution amiénoise par excellence, le Safran s’apprête à inaugurer la nouvelle édition de son festival annuel : Safra’Numériques. Du 18 au 22 mars, l’événement promet de faire de la petite Venise du Nord le point d’ancrage d’une exploration sensorielle et poétique, où les arts numériques sont prétextes à créer des ponts invisibles entre l’homme et les cieux. Au programme ? La promesse de découvrir de nouvelles formes de vie, d’observer autrement des astres, de créer un monde à soi grâce à la danse ou encore de se confronter à diverses questions concernant les prochaines mutations du vivant.
Faire parler l’univers
On l’aura compris : lors des Safra’Numériques, le numérique ne se présente plus comme un simple outil, mais comme un vecteur d’imaginaire. Une vision ni froide, ni austère de la technologie, mais bien un médium qui se conçoit comme une extension du sensible et dialogue avec le spectateur pour faire parler les étoiles. Littéralement, si l’on en croit Amélie Bouvier : laquelle, avec Quadrivium II, met en musique le ciel à partir d’images télescopiques et d’une boîte à musique mécanique. Quant à Guillaume Marmin, ce dernier invite le public à se rapprocher du soleil, devenu divinité, pour mieux entamer une discussion avec lui.
Typique de ce langage poétique généré par la machine, Recombinaison de Véronique Béland encourage de son côté le spectateur à poser sa main sur un capteur tactile connecté à une météorite. L’œuvre délivre alors un message unique, généré aléatoirement par la fluctuation d’ondes radio en provenance du cosmos. Ou comment permettre au visiteur de faire littéralement parler l’univers.
Repenser la nature
Particulièrement attirée par ces univers changeant au sein desquels le public peut modifier les formes à sa guise, l’édition 2025 des Safra’Numériques fait également la part belle à Creative Harmony de Julien Lomet, une œuvre en réalité virtuelle immersive où les participants peuvent générer un paysage virtuel à travers les gestes et une écoute mutuelle, sans nécessité aucune de rester fidèles aux données scientifiques concernant l’univers spatial. Après tout, qu’en sait-on réellement ? C’est là la question que pose (in)directement Caroline Delieutraz avec l’installation Bleen, qui accumule les créatures « potentielles » : celles aux contours méconnus qui incubent patiemment, questionnant le futur du vivant à l’ère du numérique.
De son côté, Julie Everaet nous invite à repenser notre rapport aux écosystèmes naturels à travers l’exemple du champignon, organisme vivant ni vraiment plante, ni animal : jusqu’au-boutiste, la jeune artiste française (1996) participe même avec Pleurotes à la croissance d’un mycélium hors de la Terre. Un rapport au vivant également exploité par Dominique Peysson via Biotic Game, qui imagine un jeu d’arcade dans lequel des micro-robots interagissent avec des micro-organismes, soulevant, au passage, des questions éthiques sur la biotechnologie. Comme quoi, l’exploration du cosmos n’a pas encore livré tous ses secrets, ni fini d’alimenter en fantasmes l’esprit créatif des artistes contemporains.
- Safra’Numériques 2025, du 18.03 au 23.03, Le Safran, Amiens.