À l’occasion de l’exposition consacrée à Heinz Mack au ZKM de Karlsruhe, Mack at ZKM, retour sur une œuvre de ce pionnier de l’Op Art et des arts numériques : Tele-Mack, un film de 1968 tourné dans le Sahara qui cristallise toute la pratique du plasticien allemand.
Alors qu’il se lance en tant qu’artiste, l’Allemand Heinz Mack ne connaît ni intelligence artificielle, ni réalité virtuelle. À l’époque, les années 1960, ces technologies sont encore considérées comme un pur fantasme de science-fiction, voire tout au plus un vaste projet mené par des mathématiciens dans un laboratoire de recherche. Pourtant, son esthétique futuriste et ses pratiques expérimentales marquent tant les artistes contemporains que l’on perçoit aujourd’hui encore l’influence de Mack au sein de nombreux travaux numériques.
Il faut dire que le fondateur – avec Otto Piene – du groupe ZERO (créé à Düsseldorf en 1958) a su utiliser la technologie pour la mettre au service d’un art et d’une réflexion, elles, davantage tournées vers la nature et la relation que les hommes entretiennent avec elles. Son obsession ? La lumière pure et les espaces naturels intacts, qu’il poursuit sans relâche. En 1959, Heinz Mack cherche ainsi à développer son Projet Sahara, contribuant à faire de lui une des références du Land Art. À raison : dès 1963, l’Allemand commence à installer des paysages artificiels de ses œuvres dans les déserts d’Afrique.
Une oeuvre pionnière
Grâce à son étendue infinie, le paysage désertique offre en effet les conditions idéales pour tenter de capturer cette fameuse lumière dans sa forme la plus pure. Impliquant des objets réfléchissants permettant de capter les rayons du soleil, les recherches de Mack aboutissent finalement au film Tele-Mack, achevé en 1968 et tourné durant plusieurs jours près de l’oasis tunisienne de Kebili. À mi-chemin entre recherche et manifestation artistique, Tele-Mack, ce film étiré sur une vingtaine de minutes, s’impose ainsi comme l’une des premières œuvres d’art européenne audiovisuelle, dans le sens où les interventions de Mack relevant presque du « happening » (sans public cependant) n’ont été rendues visibles au public que via la vidéo et quelques photos.
Rappelons que nous ne sommes ici qu’à la fin des années 1960 : une révolution est alors en marche, et nul doute que le projet de Heinz Mack a largement contribué à lui donner un tant soit peu de style et de profondeur.