Quel est le rôle de l’art sinon de nous mettre face aux grandes interrogations et problématiques de ce monde ? Ce postulat de départ, le duo Anne de Giafferri et Christian Delécluse en fait le cœur de sa dernière œuvre, CARGO. Découverte lors de la dernière édition de Scopitone, celle-ci nous plonge dans un parcours migratoire complexe, et s’impose comme une nécessité à l’heure des afflux records d’exilés à Lampedusa.
Il y a quelques jours, Fisheye Immersive était présent au festival Scopitone de Nantes, grand rendez-vous des arts numériques et des cultures électroniques. À cette occasion, nous avons pu découvrir la saisissante installation CARGO, d’Anne de Giafferri et Christian Delécluse, un voyage sonore mettant en lumière les trajectoires migratoires vers l’Europe.
Invité à s’installer dans une pièce où se trouvent différents salons d’écoute, casque sur les oreilles, le spectateur fait ainsi la connaissance de quatorze personnages dont il découvre les trajectoires de vie marquées par le déplacement en Méditerranée.
« Ballotée par les flots, j’ai quitté une famille, une maison, un pays »
Réalisée en collaboration avec Radio France et de nombreux chercheur.ses en sciences sociales spécialistes de ces questions, l’installation renvoie à des questions de multiculturalité, d’intégration, d’identité, et déconstruit habilement les clichés autour de la figure du « migrant ». Pour le dire autrement, CARGO est construite autour des récits de six Figures – l’Errance, la Negafa, le Religieux, la Patiente, L’Étudiant, l’Absence -, qui s’expriment chacun en français, puis dans une autre langue.
Alors que de nombreux politiques s’assoient aujourd’hui entre eux pour discuter de la “question migratoire”, l’œuvre permet d’expérimenter ce pénible voyage à travers les yeux des concernés, d’écouter ceux à qui on ne laisse jamais la parole. Favorisant l’errance, l’espace est propice à l’intériorisation des discours des différentes figures, dont la fatigue et la résilience transpercent chaque mots. « Où suis-je aujourd’hui ? (…) Trois nuits, deux matins. Pourquoi ce voyage ? ». Puissant !