Il est l’une des figures majeures de l’art contemporain, et ce depuis plus de 60 ans : l’Américain James Turrell expose simultanément ses installations lumineuses à l’espace du Bourget de la Galerie Gagosian et à Almine Rech, à Paris. Deux évènements prétextes à la redécouverte d’un artiste fasciné par les photons.
À 81 ans, James Turrell en a encore sous la pédale. La preuve avec cette double actualité : une pièce immersive inédite présentée à Almine Rech, et une monographie organisée par la galerie Gagosian, au Bourget, qui n’a rien à envier aux rétrospectives muséales. De l’autre côté du périph’, l’artiste américain, qui a fait de la décomposition spectrale son médium de prédilection, se découvre à travers 35 œuvres aussi pop que scientifiques, parfaitement représentatives de son travail sur la perception et la profondeur.
Éternel représentant du mouvement Light and Space, James Turrell travaille en effet depuis les années 1960 sur les phénomènes perceptifs, qu’ils soient sensoriels ou optiques. Son terrain de jeu préféré ? La lumière, pardi, qu’il dissèque pour en faire un sujet aux visages multiples, de même qu’un médium à part entière. Ce parti-pris est particulièrement visible chez Gagosian, tant l’exposition At One multiplie les allers-retours entre des pièces issues des archives de l’artiste et ses nouveaux travaux, dont deux installations inédites. Deux nouvelles œuvres de projection (dont Ganzfeld, où des faisceaux de couleurs pop projetés sur des murs vierges et arrondis accentuent l’idée d’une perte de contrôle) et six nouvelles pièces murales, à découvrir jusqu’en juin 2025.
La lumière au bout du Turrell
Classique sur la forme, saisissante sur le fond, l’exposition chez Gargosian se révèle également nécessaire pour qui sait que James Turrell n’avait plus bénéficié d’une exposition muséale à Paris depuis 2006, au Centre Pompidou. Bonne nouvelle : cette rétrospective est idéalement complétée par une autre exposition, nettement plus radicale, Path Taken, présentée jusqu’au 21 décembre chez Almine Rech.
Au programme ? La transformation de tout l’espace en un sanctuaire lumineux, en un lieu de spiritualité étrange où les halos vibrants de ses œuvres semblent auréoler la couleur… Quoique : « Quand les gens parlent de lumière, ils utilisent pour la décrire un « vocabulaire de la lumière » : expérience de mort imminente, transformation religieuse, voyages spirituels… Mon travail porte sur la chose même de la lumière, sur le fait de ressentir la lumière, il n’y a pas de message religieux », expliquait l’artiste à la galeriste en 2004. Vingt ans plus tard, la douzième exposition dédiée par Almine Rech à James Turrell continue malgré tout, volontairement ou non, d’entretenir le doute quant à la portée des œuvres de l’artiste octogénaire : divines ou réflexives ? La réponse tient sans doute aux convictions de chacun, selon que l’on soit spirituel ou pragmatique…
- At One, jusqu’en juin 2025, Galerie Gagosian, Le Bourget.
- Path Taken, jusqu’au 21.12.2024, Galerie Almine Rech, Paris.