Présentée par la galerie arebyte de Londres jusqu’au 13 octobre 2024, l’exposition Fragments of a Panorama s’inscrit dans un projet en cours, « Elsewhere in India », pensé pour célébrer le patrimoine culturel indien et l’histoire du deuxième pays le plus peuplé du monde.
Une série d’images où s’enchainent références cinématographiques, jeux vidéos, sculptures et représentation d’un futur spéculatif. Avec Fragments of a Panorama, c’est l’Inde rêvée et fantasmée qui s’expose, à travers le regard aussi tendre que critique de l’artiste visuel Thiruda et du musicien Murthovic. Assumant un rôle d’archiviste des temps modernes, les deux comparses revisitent et fragmentent des millénaires de traditions culturelles sud-asiatiques, d’héritage sonore et visuel et de danses indiennes pour manipuler l’espace-temps et proposer une histoire complète de la plus grande démocratie au monde.
Des archivistes qui respectent les règles, accumulant les couches de destruction, de construction et de réparation afin d’expliquer un présent en se basant sur un passé, pour anticiper un futur. En utilisant l’intelligence artificielle, les artistes modifient l’espace-temps à leur guise et proposent une vision unique d’un pays sur-représenté au sein de la pop-culture, hélas souvent via des biais orientalistes, fantasmant un bout de continent pour extrapoler ou gommer certains aspects d’une culture pourtant particulièrement riche.
Une vision post-coloniale en 4K
Ce paradoxe est celui dont s’emparent Thiruda & Murthovic dans un film projeté au cœur de l’exposition, A Road in India (2079), qui superpose des images d’archives de l’Inde coloniale avec des images générées par intelligence artificielle. À quelques pas de là, le court-métrage Telematic Transmission reprend le même procédé et s’inspire des archives de danse de Jayalakshmi Eshwar, une danseuse capturée dans des films vieux de plusieurs décennies, qu’ils transforment en une source de danses régénératrices traversant le temps, l’espace, la matérialité et la virtualité grâce à des modifications informatiques.
Plus ludique, l’oeuvre Antara prend la forme d’un un jeu interactif dans lequel l’utilisateur participe à une chasse au trésor se déroulant sur une île de Fortnite et doit récupérer des objets scannés en 3D provenant de musées situés en Inde et en Angleterre. Enfin, balayant tout le spectre de la création numérique, le duo propose également une expérience de réalité étendue (Meena XR) où le public incarne Meenakshi, un archiviste cyborg qui rassemble des fragments perdus de danse, de musique, d’art et d’architecture en voie de disparition. À l’heure des questions de restitutions et de l’écriture d’une histoire post-coloniale, Fragments of a Panorama est une exposition essentielle qui met en avant, en plein coeur de Londres, une autre version de l’histoire indienne que celle que nous servent les livres britanniques.
- Fragments of a Panorama, de Thiruda et Murthovic, jusqu’au 13 octobre, arebyte gallery, Londres.