Comme nous, l’artiste Sjors Swierstra est marqué par l’horreur de la guerre en Ukraine, qu’il vit derrière son poste de télévision. Mais là où nous nous contentons d’en discuter entre nous avant de passer à autre chose, Sjors Swierstra, lui va plus loin, bien déterminé à capturer le quotidien de ceux qui vivent la bataille de l’intérieur via Shelter, un court-métrage VR récemment présenté au festival SXSW.
Combien de fois avons-nous entendu, lorsqu’un conflit éclate, que tel peuple prend l’assaut sur un autre ? Déshumanisés, les habitants des différentes régions du monde, de Kiev à Gaza, sont encore trop souvent traités par les médias généralistes comme des éléments indissociables de la masse, des numéros sans identité, sans histoire, sans famille. Pourtant, la guerre, eux la vivent vraiment. Avec leurs craintes et leurs espoirs. Souhaitant redonner un nom et un visage aux victimes de ces conflits armés, Sjors Swierstra imagine Shelter, une expérience en réalité virtuelle qui relate la vie en temps de guerre.
Le point de justesse
Soutenu par le Fonds néerlandais pour le cinéma, Shelter reproduit en 16 minutes l’angoisse oppressante vécue par les Ukrainiens, sans jamais oublier que, derrière l’enfer, la vie continue et s’accompagne fort heureusement de quelques instants de grâce. Conscient de pouvoir être accusé de glamouriser la souffrance, Sjors Swierstra a eu la bonne idée de s’appuyer sur une équipe principalement ukrainienne, pilotée par la productrice Ivanna Khitsinska. Laquelle s’est vite octroyée d’autres casquettes : « Elle a également commencé à travailler comme réalisatrice. Elle s’est ensuite rendue seule dans des endroits très dangereux, près de la ligne de front, avec juste une caméra, et elle y a réalisé de magnifiques interviews et des prises de vue exceptionnelles. Elle a vraiment mérité le titre de co-réalisatrice, » confie le réalisateur dans les colonnes du média néerlandais See NL.
En résulte un récit touchant, au plus proche de la réalité, qui n’est ni celui des médias, ouvertement dramatique, ni celui des conversations matinales, nettement plus édulcoré. Shelter se place plus intelligemment entre les deux, avec ses moments de douleurs et ses instants de bonheur. « Nous cherchons avant tout à présenter la vie en temps de guerre dans toute sa complexité, explique le réalisateur, Il y a de la cruauté, de la souffrance, de l’ennui, de la tendresse, de la beauté, de la résilience. C’est ce que nous voulions mettre en valeur. Car pour moi, ce sont de véritables moments d’humanité partagée, et nous voulions les présenter au public et l’inviter à regarder autour de lui pour ressentir ce que le peuple ukrainien vit au quotidien. » À quand une programmation en Europe ?