Début février, lors de la Biennale Experimenta, à Grenoble, le Collectif Coin présentait sa dernière installation, l’imposante et impressionnante Pléonexie. Rencontré quelques heures avant la première de ce nouveau show, Maxime Houot en raconte le processus créatif.
Originaire de Grenoble, Maxime Houot rêvait depuis vingt ans d’investir le MIN (Marché d’Intérêt National), un bâtiment mégalo, démesuré, typique des années 1960 et emblématique de la ville. Le genre de lieu où, il y a encore quinze ans, les fêtards pouvaient boire et manger une entrecôte à 4h du matin aux côtés des ouvriers. Après un an et demi de création, Maxime Houot, directeur artistique de Collectif Coin, a pu enfin assouvir ce vieux rêve via Pléonexie, une installation lumière composée de huit mâts (semblables à des grues ou des foreuses), estimées entre 200 et 250 kgs chacune, et présentée dans le cadre de la Biennale Experimenta, à Grenoble.
« Là où “Ataraxie”, notre précédente installation, invitait à une forme d’accalmie, “Pléonexie” symbolise la grandiloquence et l’opulence de ce bâtiment, sans tomber non plus dans une débauche de matériels et de sons. L’installation est nettement plus exubérante, notamment via ces bras que l’on élève à 8m50 de hauteur, ce qui est conséquent pour des objets aussi lourds, que l’on s’est acharné à réaliser. Il y a aussi tout ce dispositif, qui s’étire sur 50 mètres, mais pour le reste, “Pléonexie” se compose essentiellement de projecteurs, ce qui ne représente pas grand-chose au sein de l’économie du spectacle. »
Double lecture
Au fond, Maxime Houot sait que la plupart des spectateurs risquent de ne voir là qu’une installation lumière de plus. Mais qu’importe : lui s’éclate à procéder autrement, à faire des copeaux, à souder, à construire et à fabriquer ses propres dispositifs – lesquels sont ensuite mis en scène, avec l’idée de s’emparer de questions fondamentales (le collectif comme forme d’épanouissement, la sobriété des dispositifs, la confrontation entre deux mondes, celui du dessous contre celui du dessus…), toutes constitutives d’une œuvre rendue plus profonde et intense grâce à ces multiples niveaux de lecture. « Le fait de me laisser accompagner par toutes ces questions lors des différentes étapes de création, c’est évident que ça me pousse à faire des choix techniques, esthétiques ou expérientiels qui, indéniablement, viennent alimenter le rendu final. Ça m’ouvre différents chemins, même si tous ne connaissent pas une issue heureuse. »
Critique de la folie expansionniste
Maxime Houot fait référence ici à la dimension écologique qui sous-tend le travail de Collectif Coin et son approche presque artisanale des technologies numériques, tout en en reconnaissant les possibles limites. « J’ai beau cherché des alternatives, j’ai bien conscience de toujours taper à côté, de ne pas trouver, de ne pas encore avoir mis la main sur cette formule qui permettrait d’être un sur-être parfait sans aucun impact sur son environnement…, conclut-il, la voix quelque peu résignée. Raison pour laquelle les installations de Collectif Coin ne partagent pas de recettes ou de méthodes à suivre. Elles sont avant tout pensées pour rappeler qu’en dépit de nombreux efforts, on ne parvient pas encore à trouver d’issues. D’où l’utilisation du terme “pléonexie”, qui renvoie à ce désir excessif d’accumulation matérielle sans égard aux répercussions que celui-ci pourrait avoir sur l’environnement ou sur autrui ».
- Cet article est extrait du 44e numéro de notre newsletter éditoriale.