Être artiste, c’est permettre la rencontre avec une œuvre, une pensée, un thème, une esthétique. Pour ce faire, il faut d’abord, du côté de l’artiste en question, s’être fait reconnaître. C’est l’objectif de « premier contact », série de mini-portraits pensés comme des speed-meeting, des premiers points d’accroche avec de jeunes artistes et leurs univers si singuliers. Ce mois-ci Fisheye Immersive s’intéresse à l’artiste Anna Lucia, dont la fusion de l’art textile et de l’informatique fait d’elle l’héritière de la regrettée Vera Molnár.
Un élément biographique
Née en 1991 à Wageningen, aux Pays-Bas, Anna Lucia se tourne d’abord vers des études de mode à l’Utrecht School of Arts, avant d’intégrer la Delft University of Technology où elle obtient un premier diplôme d’ingénieur civil, puis un second en management des eaux. Un parcours scolaire ambitieux et étonnant, mais finalement à l’image de la jeune femme, dont la pratique artistique oscille entre le code et l’artisanat. Après tout, pourquoi choisir ? Grâce à son art, Anna Lucia traduit en effet les techniques artisanales traditionnelles (notamment l’art textile) en systèmes algorithmiques.
« Je dis souvent en plaisantant que je travaille à l’intersection de l’artisanat et de l’informatique, en travaillant à la fois avec le code et les textiles comme médium », résume-t-elle au média It’s Nice That. Très coloré et géométrique, son rendu s’inscrit dans la lignée d’une Vera Molnár qui, elle aussi, repoussait autrefois les limites du code pour créer de nouvelles formes d’expression, privilégiant l’accident, l’imprévu. « Je n’ai pas conçu mes œuvres exprès. Je n’ai pas décidé qu’un rectangle bleu devait être dans un coin, un rose au milieu, tout cela est décidé par le hasard », explique Anna Lucia, dont les travaux physiques et digitaux ne cessent de se répondre dans un dialogue apaisé.
Une oeuvre
Née de la fusion entre broderie contemporaine et technologie, le projet Oefenstof lancé sur la plateforme objkt.com en juillet dernier comprend 50 éditions limitées, dévoilées au compte-goutte sur une période de quatre mois. Disponibles tous les lundis, mercredis et vendredis, ces NFTs se composent d’un scan HD de l’œuvre brodée et de son versant numérique. Pour autant, pas question d’imaginer ces œuvres comme deux entités distinctes, l’une artisanale, l’autre informatique. Les travaux brodés sont en effet le fruit d’un algorithme développé par l’artiste et relié à une machine à broder, chargée de réinterpréter des motifs textiles traditionnels.
Un haut fait d’armes
Présente au sein de la programmation la Biennale de Venise en 2022, Anna Lucia fait partie des quelques artistes invitées à inaugurer le Decentral Art Pavilion (DAP), premier pavillon immersif de l’événement et témoin de l’évolution des pratiques créatives actuelles. Auprès d’autres artistes numériques, elle a ainsi marqué l’histoire en participant à la première exposition NFT de la fameuse Biennale. Habituée des expositions collectives d’envergure, Anna Lucia a également été présentée à Art Basel en 2021 et 2022 ou à Vellum LA la même année. Et si ce n’était là que le début ?