Rendez-vous incontournable des amateurs d’expériences fulldome, le SAT Fest, basé à Montréal, récompense chaque année des projets cinématographiques adaptés à l’expérience 360. Retour sur les vainqueurs d’une édition débordant d’idées neuves.
Une exploration d’un champignon unicellulaire, un voyage dans le subconscient ou encore un paradis virtuel pour feuilles mortes… Les projets récompensés par le jury du festival de la SAT (Société des Arts Technologiques) de Montréal brillent aussi bien par leur poésie que par leurs prouesses techniques. Preuve en est faite avec les six lauréats de la dernière édition, toujours plus internationale, toujours plus à l’affut d’une créativité sans bornes.
Inner Island – Sergey Prokofyev
Mention spéciale du jury, le travail de l’artiste ukrainien Sergey Prokofyev s’inspire de la pièce musicale Souvenir de Porto Rico du compositeur Louis Moreau Gottschalk (1857) pour créer un espace architectural en constante évolution dont les contours suivent le rythme d’une mélodie complexe. En résulte un court-métrage d’à peine plus de six minutes, et pourtant riche d’images fortes, marquantes, rendues plus saisissantes encore grâce à une caméra dynamique, tellement remuante qu’elle génère par instants l’émergence de séquences abstraites.
Ignite! – Lynn Tomlinson
Récompensé pour son originalité, le projet de Lynn Tomlinson connecte lui aussi la musique et l’image dans un court-métrage où le son et l’animation s’influencent mutuellement. En faisant collaborer des étudiants en art, en cinéma et en musique de l’Université de Towson (où l’artiste enseigne), l’artiste américaine, spécialisée dans l’animation, met en scène une chorale en direct improvisée sur une animation rotoscopée colorée. Pour un rendu ludique et acidulé qui fait parfaitement sens avec ce que recherche Lynn Tomlinson via la technologie fulldome : l’expérience collective, voire carrément collaborative.
Dancing with Dead Animals – Maarten Isaak de Heer
Artiste d’animation basé à Berlin, Maarten Isaäk de Heer remporte deux prix (Les prix « Innovation » et « Excellence ») grâce à un projet poétique inspiré de son environnement immédiat. Après avoir réalisé des photogrammes 3D de toutes les créatures mortes autour de lui, l’artiste les installe dans un Eden 2.0 où Adam et Eve dansent entourés des matériaux organiques en décomposition ramenés à la vie, dans un tableau des plus esthétiques. On reste en effet particulièrement admiratif de la manière dont Maarten Isaak de Heer parvient à faire de chaque séquence un tableau à part entière, Dancing with Dead Animals tenant finalement moins d’un étrange documentaire animalier que d’une installation de peintures projetées à 360 degrés.
Protist Rhapsody – Uncharted Limbo
Lauréat du prix « Trame sonore », le collectif anglais Uncharted Limbo s’intéresse lui aussi à la matière organique en plongeant le spectateur dans le cycle de vie du Physarum Polycephalum, une espèce de champignon unicellulaire. Un voyage complètement fou qui questionne, à travers l’étude du mycélium, les fondamentaux de l’existence humaine. Derrière cet aspect, foncièrement scientifique, restent en tête l’élégance de la mise en scène, ainsi que les mouvements presque chorégraphiques de cette entité numérique visible à l’écran – pas un hasard quand on sait que Uncharted Limbo collabore régulièrement avec des chorégraphes, des musiciens et des chercheurs en blouse blanche.
FEED – IMUU
À la manière d’un jeu vidéo, le collectif IMUU nous invite à jouer le rôle d’une souris d’ordinateur afin d’explorer un monde complexe aux airs de panoptique, cette architecture carcérale imaginée par les frères Jeremy et Samuel Bentham dans l’idée de permettre au regard de saisir la totalité d’un espace. L’occasion pour ceux qui ont reçu le prix de l’« Œuvre narrative » d’interroger notre existence numérique et de poser un regard critique sur notre ère post-digitale et le capitalisme. Quand art numérique rime avec réflexions dystopiques…
Dream – Ari Dykier
Lauréat du prix du « Public », le court-métrage Dream a été imaginé par Ari Dykier selon la technique du collage et fait référence à la tradition du surréalisme, du steampunk et des gravures du XIXème siècle. Une esthétique mise au service de la découverte du subconscient du spectateur, qui est invité ici à interpréter librement les images et les symboles apparaissant à l’écran.