À la galerie Julie Caredda, à Paris, l’artiste française Anne Horel expose ses Créatures, sorte de chimères hybrides situées entre l’humain et l’avatar numérique. À découvrir jusqu’au 23 décembre !
Pour saisir l’essence de notre époque
Le numérique a chamboulé bien des choses. Entre opportunités créatives et questionnements, Anne Horel s’empare de ces nouveaux outils pour mettre en lumière les enjeux sociaux et artistiques à l’ère de la technologie. Si, depuis 2008, l’artiste est largement inspirée par les réseaux sociaux et les nouveaux médias, son travail a récemment pris une nouvelle dimension, plus critique, mise en lumière à la galerie Julie Caredda. Ses expériences ont notamment amené Anne Horel à réfléchir à la mémoire et aux traces que nous laissons à l’ère numérique, elle qui a perdu de nombreux projets dans les méandres d’Internet suite à la fermeture de plusieurs plateformes digitales. Sortes « d’autels de mémoire », ses œuvres, au doux accent kitsch et surréaliste, interrogent la dématérialisation de l’art et, plus largement, celle de notre société capitaliste.
Pour s’échapper du quotidien
Si l’art motive la réflexion, il permet aussi de rêver et de se confronter à des mondes imaginaires, aux contours bien éloignés de notre univers. En convoquant la mythologie, la spiritualité ou encore la cartomancie, Anne Horel, via la céramique, la vidéo ou l’art numérique, crée de petits monstres attachants, des entités « câble-connectées » rattachées à la vie terrestre par des fils invisibles, vouées à faire le lien entre l’infini du monde numérique et le nôtre, plus restreint. Attention, cependant : derrière des couleurs pop et des formes douces, ces créatures nées de l’accumulation dénoncent. En jouant avec les codes de l’abondance et du tumulte, la plasticienne pointe ici du doigt la surconsommation, et la quête du « toujours-plus » qui régit notre quotidien.
Pour découvrir une scénographie évolutive
Si l’on s’attend à un white cube aussi froid qu’impersonnel au moment de mettre un pas dans une galerie, Julie Caredda fait ici le choix de l’excès, rendant ainsi justice au travail de l’artiste exposée. Immersive, la scénographie reflète l’accumulation présente dans l’œuvre d’Anne Horel et joue, elle aussi, avec les éléments de « trop » évoqués plus tôt. L’un des murs de la salle d’exposition est ainsi orné d’un papier peint représentant de la nourriture et des créatures, comme une référence au fast-food, symbole absolu de la société de surconsommation et du capitalisme. Au fond, Créatures n’est finalement que ça : un fascinant cabinet de curiosités regorgeant de gadgets et d’objets insolites qui renvoient, eux aussi, à la fascination de l’artiste parisienne pour l’empilement et le chaos.