Sous le chapiteau d’un cirque, trois jeunes artistes profite de l’exposition Dans le mirage, effective jusqu’au 15 septembre à l’Open Circus de Montpellier, pour faire émerger des « surréalités digitales ». En creux, l’envie de refléter des regards minoritaires et ouvertement politisés.
Cet été, Open Circus à Montpellier devient chaque nuit le théâtre de cracheurs de feu, de magiciens et de trapézistes. Le jour, en revanche, il abrite une exposition d’art digital proposée par Métaculture, persuadé que cette réunion de deux mondes qu’a priori tout oppose tombe totalement à propos. À l’image d’un cirque, l’exposition Dans le mirage s’anime de cette même envie de créer un espace alternatif à la réalité, « où se brouillent les frontières entre l’irrévérencieux et la satire, le centre et la périphérie, la réalité et la surréalité, la norme et l’anomalie. » Il convient en effet de ne pas oublier l’essentiel : le cirque renvoie également à cette tradition populaire de l’illusion et de la métamorphose.
À Montpellier, Dans le mirage se veut aussi minimaliste que percutante, et ambitionne de déclencher des révélations, des électro-chocs. Pour cela, l’exposition se concentre autour de trois oeuvres. Profitant des 400 m² d’écran offerts par ce chapiteau pas comme les autres, toutes se présentent sous forme de vidéos intégrant des technologies numériques, telles que l’image de synthèse, l’animation 3D ou l’intelligence artificielle – « ce genre de procédés qui unifie la sélection et rattache l’expo à l’univers du web3 » explique Mikaïl Chebel, curateur de Métaculture. En prime, ces trois œuvres sont le fait d’artistes issus de communautés diasporiques chargés de livrer un discours alternatif sur les problématiques actuelles.
Le mirage, métaphore d’une désillusion salutaire
En d’autres mots, c’est à notre représentation du monde édulcorée, bercée d’illusions rassurantes, que s’attaquent les visions déployées ici. L’idée : faire émerger des contre-regards en déformant le réel pour mieux révéler les troubles de notre monde. Il y a Zine Andrieu qui produit un docu-fiction alternant images réelles et 3D en écho aux émeutes de 2005 – lesquelles résonnent tristement avec les mouvements populaires de cet été.
Au sein de la programmation il y a aussi Saki, qui nous immerge dans les fêtes pleines de vie du squat de B93 à la Courneuve. En tête ? L’envie de nous fait découvrir au sein d’un objet polymorphe sa découverte de ce lieu, comme une fenêtre d’espoir avant son expulsion. Enfin, il y a Marina Madras dont le travail laisse voir un Liban fracturé, à la fois empli de force et de poésie, à travers le prisme des émotions intimes et collectives, comme pour dire que rien n’est réductible à une vision simpliste et uniformisante.
La force de ces oeuvres ? Puiser dans les possibilités du numérique pour matérialiser des « mirages » qui, en retour, défont nos idées fausses, se jouent des préconçus sur les squats, les mouvements contestataires, les pays non-occidentaux… « Quand on s’approche de l’objet tant critiqué, on arrive à une nouvelle compréhension », appuie Mikaïl Chebel. Grâce à la scénographie immersive, laissons-nous donc absorber par ces regards salutaires, « fruits des aspirations d’une jeunesse en proie aux doutes, mais résolue à façonner le monde de demain ».