Depuis plus de 10 ans, Collectif Coin a fait de la création d’installations monumentales, déclinées en performances, sa spécialité. Travaillant autour des questions de l’espace, du son et de la lumière, Maxime Houot, directeur artistique de la structure, affirme que tous les projets naissent d’un même point : le pixel, exploré sous toutes ses formes. L’occasion de se pencher sur le riche travail du Collectif Coin, et de s’intéresser à ses deux derniers projets : EtSi…, une performance chorégraphique et audiovisuelle, et Ataraxie, une installation tout en jeu de lumières.
« À l‘origine, je viens des musiques actuelles. J’ai une expérience en tant que musicien qui me permet de connaître assez bien les enjeux de la scène, confie d’emblée Maxime Houot. C’est donc assez naturel pour Collectif Coin de se revendiquer du domaine du spectacle vivant. Pour chaque projet que j’imagine, j’ai le goût de la dramaturgie et du théâtre. » C’est en effet un élément fort de l’ADN de ce laboratoire artistique, basé à Grenoble : bien que le matériau principal soit la lumière, celle-ci permettant de sculpter l’espace ou de créer des univers immersifs, un vrai scénario se déploie dans chacune des performances, jouées la plupart du temps dans des lieux spacieux (hangars, jardins, parvis d’église…). Quant aux dispositifs sonores, souvent grandioses, ils sont conçus sur mesure et viennent sublimer cette narration lumineuse.
L’infiniment grand
Collectif Coin compile aujourd’hui une dizaine d’œuvres présentées dans de prestigieux événements d’arts numériques (Sonica, Scopitone, Némo, Nuit Blanche, Mapping, BAM…). Son corpus se distingue par la recherche autour de la lumière, et notamment de l’unité de base de la définition d’une image numérique : le pixel. Maxime Houot explique : « Quel que soit le projet, je pars toujours de la notion d’un point lumineux, d’un pixel, quitte à les présenter sur certains projets dans une série de pixels. Je m’amuse à jouer avec l’échelle de grandeur de ces éléments, ne serait-ce que pour obtenir une sorte d’écran géant assez abstrait. »
Pensons par exemple à Child Hood, un nuage d’une dizaine de ballons lumineux contrôlés à distance : cette œuvre minimaliste, mais néanmoins spectaculaire, peut également être qualifiée d’installation cinétique monumentale. Après tout, l’idée est également de jouer avec un élément naturel : le vent, lequel s’engouffre entre les ballons, comme un ultime interprète, insufflant une pointe de chaos au sein d’une composition son et lumière millimétrée. « Child Hood est un des projets incontournables de Collectif Coin, qui marque un tournant dans la recherche autour de la lumière », ajoute Maxime Houot.
Plaisirs inconnus
La suite du travail de Collectif Coin s’inscrit plus ouvertement encore dans une recherche approfondie du pixel. Avec Abstract, celui-ci est intégré dans un espace en trois dimensions, notamment en explorant des déplacements verticaux. Puis le pixel mue en de simples traits lumineux, témoins de l’orientation artistique abstraite assumée par Collectif Coin.
Ataraxie, sa dernière installation, présentée pour la première fois à l’occasion de l’ouverture du Cube Garges en mars dernier, s’inscrit dans cette logique : un ballet de lumières rouges, dont les formes deviennent de plus en plus complexes au fil de la performance, invite le public à réfléchir au sens de la tranquillité dans un monde en mouvement constant. L’installation explore l’inconnu, et se demande si nous pouvons le combler avec ce qui est confortable et familier, ou trouver de nouvelles façons de vivre.
Les traits lumineux (les pixels, donc) sont également au centre de la dernière performance chorégraphique, EtSi… Lora Juodkaite (danseuse), Rachid Ouramdane (chorégraphe) et Maxime Houot proposent ici une pièce faite de torsions visuelles. Par un jeu habile entre lumière et obscurité, cette pièce fausse les repères de la perception et semble mettre en mouvement l’espace dans lequel se trouve le spectateur. Une réussite, tant Maxime Houot imagine ici un mobile sur lequel sont disposées plusieurs halos lumineux, proposant un voyage où les notions de plein, de vide, de hauteur, de profondeur et d’échelle se transforment sans que l’on en saisisse la logique.
C’est d’ailleurs là la grande réussite d’EtSi…, programmé à la rentrée prochaine au Pavillon Noir d’Aix-en-Provence (en collaboration avec Seconde Nature Zinc) : mêler le mouvement des lumières à la giration des gestes de la danseuse, plongeant le public tout à la fois dans le calme de l’œil du cyclone et dans la puissance qui l’entoure. Une certaine idée de l’immersion, donc.