Être artiste, c’est permettre la rencontre avec une œuvre, une pensée, un thème, une esthétique. Pour ce faire, il faut d’abord, du côté de l’artiste en question, s’être fait reconnaître. C’est l’objectif de « premier contact », série de mini-portraits pensés comme des speed-meeting, des premiers points d’accroche avec de jeunes artistes et leurs univers si singuliers. Cette fois, Fisheye Immersive s’intéresse à Jisoo Yoo. Originaire de Séoul, l’artiste sud-coréenne questionne à travers son travail la nature des frontières religieuses, sociales, politiques et psychologiques auxquelles elle a pu être confrontée. Une démarche ambitieuse, circonscrite dans une œuvre lourde de sens : Le plus ordinaire, le plus illusoire, aujourd’hui récompensée du prix « Révélation Art Numérique – Art vidéo » de l’ADAGP et visible à l’occasion de l’exposition Panorama 25, présentée jusqu’au 7 janvier 2024 au Fresnoy.
Un élément biographique
Née à Séoul en 1990, la jeune Jisoo Yoo s’envole pour Paris en 2013 afin de rejoindre l’École nationale supérieure d’Art Paris-Cergy. Après avoir obtenu son diplôme en « Expression Plastique » en 2018, elle intègre trois ans plus tard la promotion Marguerite Duras du Fresnoy – Studio national des arts contemporain. Entre temps, la Sud-Coréenne accumule les récompenses : lauréate du Prix BIC en 2017, du programme de « Création en Cours » pour une résidence de recherche et création à Paris en 2019, du Fonds régional pour les talents émergents (FoRTE) la même année ou encore du Prix du Jury de la 18e biennale d’art contemporain de Champigny en 2022. La trentaine à peine entamée, Jisoo Yoo est d’ores et déjà à la tête d’un beau palmarès !
Quant à son œuvre, protéiforme, elle associe pratique du dessin et de la sculpture, mais aussi des installations, audiovisuelles et des performatives, qui ont déjà séduit une multitude d’institutions de renom. On a notamment pu voir ses travaux lors d’expositions collectives au Musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis, aux Grands Voisins parisiens, aux Abattoirs à Toulouse ou encore au Centquatre à Paris.
Une oeuvre
Le plus ordinaire, le plus illusoire (2023) est une installation présentant une performance interactive en « temps réel », rendue possible grâce à la motion capture et composée de deux vidéos-projections restituant l’image en mouvement, à la fois vue par le spectateur, témoin du monde réel, et vue par le biais d’une caméra située dans le monde virtuel. Avec toujours cette question de la frontière chevillée au corps, Jisoo Yoo explore cette fois-ci la limite entre le réel et l’irréel via deux procédés : d’abord, en exécutant dans le monde virtuel nos gestes les plus quotidiens, ce qui ne manque pas d’intriguer quand on sait à quel point la plupart des artistes se laissent plus volontiers tentés par l’inédit promis par les technologies numériques ; puis en faisant virevolter des vêtements inhabités, comme s’ils étaient portés par des fantômes. On comprend alors que, pour l’artiste pluridisciplinaire, ces deux mondes « coexistent, communiquent et s’influencent mutuellement ».
Une récompense
C’est justement cette œuvre qu’a sélectionné l’ADAGP pour son prix « Révélation Art Numérique – Art vidéo », qui récompense les travaux des étudiants de deuxième année du Fresnoy, ceux-ci étant censés explorer le champ très vaste des arts numériques.
Dévoilées le 22 septembre dernier à l’occasion de l’inauguration de l’exposition Panorama 25, les lauréats reçoivent une dotation de 5 000 € et bénéficient d’un portrait filmé et diffusé sur le site d’Arte. Leur travail est ensuite exposé dans le cadre d’une présentation à l’ADAGP et se voit également accompagné d’un texte critique. Conclusion : Jisoo Yoo n’a pas fini de séduire les professionnels du paysage artistique et d’étendre ses visions au sein d’expositions qui, c’est une certitude, devraient faire d’elle la future sensation de l’art contemporain.