La plateforme de VTC Heetch, dont une majeure partie de la clientèle se situe en banlieue parisienne, s’est prêtée au jeu de Midjourney et a demandé à l’IA de générer des images pour illustrer le quotidien de la périphérie. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les clichés ont la peau dure.
Utiliser Midjourney peut s’avérer très amusant. On écrit quelques mots sur Discord, et une image se génère à partir des indices qu’on lui a fournis, en puisant, bien sûr, dans une source immense de datas. Ce sont ces données, justement, qui permettent à l’IA de créer un visuel inédit illustrant nos propos. Que se passe-t-il alors quand les sources de l’intelligence artificielle sont elles-mêmes ultra-stéréotypées ?
L’entreprise Heetch, VTC leader en banlieue, s’est prêtée au jeu et a découvert avec effroi que dès que le mot « banlieue » est ajouté à la requête, les images deviennent extrêmement négatives. Dans une vidéo publiée sur ses réseaux sociaux, l’entreprise démontre que lorsque l’on demande à l’IA de générer une image d’un « mariage en France », celui-ci est systématiquement élégant, lumineux, incarné par des époux à la fois souriants et fringants. Si l’on ajoute le terme « banlieue » au prompt, la noce s’assombrit, la robe se déchire et la cérémonie se déroule soudainement sur un tas de déchets. Est-ce donc cette représentation de la banlieue qui prime au sein de l’imaginaire collectif ?
Bons baisers de la banlieue
Cette situation est en tout cas dénoncée par Heetch dans une campagne réalisée en collaboration avec l’agence BETC, intitulée « Greetings from la banlieue », en clin d’œil aux célèbres cartes postales américaines. Pour cela, le VTC aux voitures roses a franchi le périph’ et immortalisé les lieux et les habitants de banlieues parisiennes afin d’en faire des cartes postales destinées aux onze employés de Midjourney.
Au verso de ces cartes, mise à disposition dans les quartiers populaires et dans les véhicules Heetch, un QR code mène à une base de données visant à étoffer celles utilisées par l’IA, qui ne rend pas justice à la banlieue. « On parle de 12,5 millions de personnes, c’est de facto une population disparate, protéiforme, haute en couleurs et, nous qui la sillonnons au quotidien, on sait que la banlieue a quelque chose d’hyper positif et d’hyper beau à raconter, souligne Renaud Berthe, directeur du marketing chez Heetch. On se devait de mettre le doigt sur cet écueil de représentation, pour, à termes, éventuellement l’infléchir et a minima éveiller les consciences. »