À l’approche des élections législatives prévues les 30 juin et 7 juillet prochains, Fisheye Immersive s’intéresse aux artistes qui utilisent leur pratique pour éveiller les consciences.
Jamais, sous la Ve République, l’extrême-droite n’a été aussi proche d’accéder au pouvoir. Un constat alarmant sur lequel un grand nombre d’artistes attire notre attention, consciemment ou non, via des dystopies ou des œuvres plus manifestement engagées. À l’approche du premier tour des élections législatives, Fisheye Immersive focalise ainsi son attention sur cinq oeuvres qui ne donnent envie que d’une chose : se précipiter dans l’isoloir le 30 juin, dès l’ouverture des bureaux de vote.
White Cloud, d’Emmanuel Van Der Auwera
Conçue dans sa quasi-intégralité à l’aide d’une intelligence artificielle, White Cloud (2023) est une vidéo s’intéressant au quotidien des ouvriers d’une mine de terres rares en Mongolie Intérieure. Un long-métrage qui cristallise toute une pléiade d’enjeux contemporains, du capitalisme aux traitements humains, en passant par des questions écologiques et géopolitiques. De quoi donner envie de changer les choses, faire de l’art un outil de sensibilisation, et espérer ainsi façonner le monde meilleur de demain.
Les dernières œuvres en IA de Seumboy Vrainom :€
« Les temps changent, mais la France n’a pas compris qu’on a plus peur de la tempête.» peut-on lire sur la première œuvre de la nouvelle série de Seumboy Vrainom :€, générée à partir de MidJourney. Dans ce travail, dévoilé au compte-gouttes sur son compte Instagram, et systématiquement accompagné de textes réflexifs écrits par Frantz Fanon ou Léonora Miano, l’artiste parisien revient sur les origines de la colonisation et ses effets contemporains, mais aussi sur la notion d’allier et la dénomination « noire », qui continue tristement de désigner toute une population pourtant diversifiée. Une manière de faire table rase avant d’espérer écrire une nouvelle histoire qui échappe à la domination occidentale.
An eye for an “I”, de Christelle Oyiri
Actuellement exposée au MMK, l’œuvre immersive An eye for an « I » s’intéresse à la figure du chouf (« guetteur », en VF), cette entité discrète chargée d’alerter immédiatement les trafiquants de drogue, tout en restant elle-même invisible. Une exception dans notre monde ultra-surveillé, entre les caméras à chaque coin de rue et les cookies à chaque clic. À travers le chouf, Christelle Oyiri entend critiquer cette société qui nous épie et questionner un modèle de contre-surveillance comme brèche vers la liberté.
Comfortless, de Gina Kim
Présentée lors de l’édition 2023 de Venice Immersive, Comfortless est le dernier volet de la trilogie VR de Gina Kim, qui invite ici le spectateur à s’immerger dans l’American Town, un bordel créé exclusivement pour la base aérienne américaine en Corée du Sud, en 1969. Ruinée par la Guerre, la Corée a largement compté sur ces travailleuses du sexe des « camps towns » pour se relever, effaçant peu à peu cet épisode de son histoire contemporaine, probablement trop honteuse à son goût. Pourtant, près d’un demi-million de femmes ont été impliquées dans le « réconfort » des troupes américaines… Ingratitude, quand tu nous tiens !
The Mapping Journey Project, de Bouchra Khalili
Déployée sur huit écrans, l’installation The Mapping Journey Project suit la main d’un migrant traçant avec un stylo sur une carte le voyage qu’il a effectué pour entrer en Europe depuis l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie du Sud. Utilisant la main comme symbole de l’intime, l’artiste visuelle franco-marocaine Bouchra Khalili rend palpable ces déplacements que nombre de politiques évoquent comme quelque chose de grave ou d’encombrant, sans jamais mettre l’humain au centre du débat, ni questionner le monde postcolonial et ses frontières.