Si Julius Horsthuis utilise les fractals afin d’explorer les mondes qui se cachent dans les formules mathématiques, ses œuvres sont avant tout des portes ouvertes vers des univers qui semblent tout droit sortis du domaine de la science-fiction. Portrait d’un artiste aux influences cinématographiques.
Se plonger dans les mondes fractals de Julius Horsthuis, c’est s’élancer dans l’inconnu, partir à la rencontre des secrets qui se cachent derrière les formules mathématiques. L’artiste, passionné de cinéma, s’y destinait. Il y a déjà ses films, qu’il s’amuse à réaliser et à monter depuis l’enfance. Il y a aussi cette formation en réalisation et en effets visuels, où il apprend la technique, la méthode. Pendant un temps, il y a même l’envie d’intégrer des écoles de cinéma, mais le Français en est malheureusement tenu à l’écart. Pas de quoi pour autant en garder rancune. Qu’importe si les institutions ne veulent pas de lui, Julius Horsthuis se découvre une œuvre passion, au hasard d’une vidéo trouvée sur YouTube : l’art fractal, notamment via une vidéo de Krzysztof Marczak.
« Quand j’ai découvert les fractals, je les ai trouvés magnifiques, comme une très belle manière de s’exprimer, resitue-t-il. J’ai pu utiliser tout ce que j’avais appris sur les plateaux de tournage de film et dans le monde des effets visuels pour l’appliquer aux mathématiques, montrer que l’on peut les utiliser afin de faire voyager les gens et leur montrer que d’autres mondes peuvent exister dans une certaine réalité mathématique ». Ces mondes, Julius Horsthuis se plaît à les explorer grâce à des logiciels comme Mendel3D qui permettent de prendre des formules mathématiques et de les transformer, via la machine, en des formes étranges pouvant par la suite se moduler.
Évidemment, un tel processus nécessite patience et précision. Cela peut en effet prendre plusieurs semaines afin que les formules se transforment en un univers nouveau. Julius Horsthuis ne s’en formalise pas, et voit même dans ce geste créatif des points communs avec la réalisation d’un film », ne serait-ce que parce qu’il « faut éditer, corriger la couleur, trouver la bonne musique pour aller avec l’histoire que l’on veut raconter ». Ou comment renouer avec son amour pour le 7ème art dans la conception d’œuvres fractales. Une belle revanche !
Plus que de l’art, un savant calcul
À observer Julius Horsthuis décortiquer son art, une question demeure : faut-il réellement s’y connaitre réellement en mathématiques pour pouvoir faire de l’art fractal ? Répondre par l’affirmative serait tentant, surtout lorsque l’on connaît le processus de création qu’un tel courant artistique suppose. Pourtant, le Français refuse de considérer l’art fractal comme un domaine réservé à celles et ceux ayant la fibre scientifique : « Les mathématiques sont le langage de la nature, affirme-t-il. C’est une phrase d’un film de Darren Aronofsky, mais c’est quelque chose qui se vérifie autant dans la vie réelle que dans l’utilisation des fractals. Il faut bien avoir en tête que le monde est défini par de très simples règles mathématiques qui ont l’air immensément complexes ».
Sur sa lancée, Julius Horsthuis tient à être clair : il « jamais vraiment étudié les mathématiques, seulement au lycée… Pour être honnête je ne pense pas qu’elles m’ont vraiment intéressées n’ont plus. C’est seulement lorsque j’ai vu les visuels complexes que l’on peut en tirer que cela a changé. Lorsque j’ai découvert les fractals, j’étais en train d’écrire un petit film et je voulais qu’une des scènes soit un mélange entre réalité et conception par ordinateur. J’ai commencé à faire des recherches qui m’ont permis de trouver une formule fractale correspondant à mes besoins. C’est vraiment à ce moment-là que j’ai commencé à expérimenter l’art fractal, c’était tellement intrigant de voir que l’on pouvait créer de l’art à part entière. Cela pouvait être un projet autonome ».
La science-fiction en tête de proue
Lorsque l’on s’attarde sur le travail de Julius Horsthuis, il est difficile de ne pas y voir des références de science-fiction. Les formes, les couleurs et les détails semblent pensés en ce sens. Visiblement d’accord avec cette analyse, l’artiste dit concevoir de courts films, ramenant indéniablement à des esthétiques bien connues. Parfois, cela tend vers le jeux vidéo ; d’autres fois, les mondes façonnés tiennent davantage de l’imaginaire littéraire, de ses créatures futuristes qui peuplent les ouvrages des romans d’anticipation.
L’intéressé préfère toutefois se méfier de toute comparaison hâtive : « J’aime la science-fiction. J’ai été inspiré par des films comme Inception de Christopher Nolan. Cela dit, je pense que la raison pour laquelle mon art y ressemble ne résulte pas d’un choix intentionnel ; c’est tout simplement intrinsèque aux fractals. Je peux vous affirmer que lorsque vous explorez les fractales, vous trouverez soit quelque chose qui semble très naturel ou très proche de la nature, soit quelque chose qui ressemble à une perversion grotesque de cette dernière. Très souvent, vous rencontrerez également des choses qui semblent tout droit sorties d’un film de science-fiction, des choses qui ressemblent à des planètes extraterrestres, à des vaisseaux spatiaux très élaborés ou à quelque chose de ce genre. Le fait que mon art fasse penser à de la science-fiction est donc avant tout un joyeux accident ».
À entendre Julius Horsthuis, sa véritable inspiration proviendrait d’une autre forme artistique, sonore : la musique. « Celle-ci est presque comme la synesthésie. J’ai l’impression d’entendre les couleurs des sons, explique-t-il. En quelque sorte, vous fermez les yeux et vous voyez la musique couler comme une sorte d’espace tridimensionnel. C’est ce qui m’inspire le plus : la musique a un vrai impact sur moi et mon art, notamment la musique de film. » Par chance, le Français a pu ces dernières années travailler avec des compositeurs de film comme Éric Serra, compositeur de la BO de James Bond et proche collaborateur de Luc Besson (Le Grand Bleu, Léon, etc.).
Dans les travaux de Julius Horsthuis, tout ne serait donc qu’une question de dosage : il s’agit à chaque fois de trouver un équilibre entre les images et la musique, de favoriser la symbiose de ces deux éléments sans pour autant en dire trop, l’intéressé préférant laisser chacun apprécier l’œuvre selon ses codes ou son bagage culturel. « J’aime inviter les gens à entrer dans ces magnifiques mondes psychédéliques afin d’inventer leur propre sens ou leur propre histoire. Au fil du temps, j’ai entendu tellement d’interprétations différentes…, confie-t-il. Cela me paraît si important de créer un environnement où les gens sont stimulés, invités à réfléchir et à essayer de trouver un sens à l’œuvre » Il est vrai qu’avec son art qui nous transporte dans des mondes futuristes, Julius Horsthuis offre la liberté de faire courir son imagination au moment de plonger au cœur de ses œuvres.