Au carrefour entre recherche en biochimie et art contemporain, le travail de Saša Spačal dépasse les frontières de la création. À l’heure où la transition écologique n’apparaît plus comme une simple option, l’artiste slovaque profite du numérique pour soulever des questions d’utilité publique.
Longtemps, l’homme a pensé régner en maître sur la planète. Une position de souverain largement remise en cause aujourd’hui, notamment par la communauté artistique. Actrice proactive de cette scène, l’artiste postmedia Saša Spačal associe les disciplines – de la recherche sur les systèmes vivants à l’art contemporain, en passant par la création sonore -, et s’intéresse à ce qu’elle nomme « la condition posthumaine ». Une notion qui illustre l’idée selon laquelle les êtres humains existent et agissent comme l’un des nombreux éléments de l’écosystème, et non comme ses maîtres.
Entre science et art
Cet abandon du système cartésien se manifeste chez elle par des interfaces technologiques mises en relation avec des matériaux organiques et minéraux. L’année dernière, l’artiste a notamment bénéficié d’une résidence au Art Laboratory Berlin, durant laquelle elle a pu entreprendre des recherches artistiques pour son nouveau projet Terra Xenobiotica. Qu’elle explique : « Terra Xenobiotica est une exploration d’une sombre altérité de l’écologie du sol, un umwelt à part entière, où les agents minéraux et organiques s’entremêlent comme des étrangers, mais se décomposent en une unité du sol qui porte la vie biologique dans la Zone. »
Si ce n’est pas la première fois que Saša Spačal collabore avec le Art Laboratory Berlin – elle y a exposé en 2016 et 2017, y a effectué des travaux de recherche artistique en 2017 et y était résidente deux ans plus tard -, c’est là l’occasion pour la Slovaque d’étudier les aspects temporels des substances et métabolismes xénobiotiques se trouvant à proximité des aéroports, tout en assouvissant ses désirs de plasticienne, ses pulsions artistiques. Sans jamais perdre de vue l’expérience esthétique, Terra Xenobiotica se reçoit donc comme l’alliage de la science et de l’art, un projet où Spačal utilise ses connaissances scientifiques pour faire se rencontrer différents éléments biologiques grâce à des dispositifs d’échanges, qu’ils soient acoustiques, électroniques ou métaboliques.