Dans cette nouvelle série, Fisheye Immersive remonte le fil de l’histoire jusqu’à la source de l’art numérique contemporain : le computer art. Pour ce quatrième épisode, direction les années 1980 et l’adoubement de l’art numérique par le Pape du Pop Art, Monsieur Andy Warhol.
Depuis quelques semaines, Fisheye Immersive vous propose de voyager dans le temps et de remonter à la source de l’art numérique. Après avoir exploré les années 1950, 1960 et 1970, c’est désormais dans les eighties que nous plongeons, décennie marquée par la prise en main du computer art par l’une des stars de l’art contemporain : Andy Warhol.
Bien que les années 1980 soient connues pour être celles de sa collaboration avec Jean-Michel Basquiat, elles sont également, de façon plus discrète, celle de ses premières expérimentations digitales. C’est d’ailleurs en 1985 que l’artiste à la perruque peroxydée reçoit son premier ordinateur personnel, un Amiga 1000 de la marque Commodore International – dont il devient illico l’ambassadeur, l’égérie parfaite. En effet, à l’occasion du lancement de ce nouveau modèle, l’entreprise américaine invite la chanteuse de Blondie, Debbie Harry, à faire le show sur la scène du Lincoln Center, tandis que le plasticien utilise de son côté le nouveau logiciel informatique ProPaint pour dessiner en direct le portrait de la rockeuse. Une certaine idée de la performance et de la mise en scène, en quelque sorte.
La création numérique, un plaisir coupable ?
Jusqu’en 2014, cet exemple était le seul que nous avions. Mais, plus de trente ans après cet événement, le Andy Warhol’s Museum, situé à Pittsburgh, a eu la bonne idée de s’associer avec l’artiste Arcangel, l’Université Carnegie Mellon et le Carnegie Museum of Art. L’objectif ? Extraire des fichiers sauvegardés des disquettes Amiga conservées dans leur collection d’archives, sans vraiment savoir ce qu’il y aurait dessus. Résultat ? Près de quarante disquettes redécouvertes, sur lesquelles ont été enregistrées un bon nombre d’œuvres d’art numériques.
Alors pourquoi ne pas avoir étudié ces archives auparavant ? En raison de la fragilité des supports, inexploités depuis les années 1980… Longtemps, les conservateurs ont en effet été confrontés à un double dilemme : se lancer dans un processus d’archivage et de visualisation au risque (élevé !) d’endommager les contenus, ou laisser les disques à l’abandon, quitte à officialiser la mort prochaine de la matière qu’ils renferment. À l’aide d’un KyroFlux, les experts en charge du projet ont ainsi pu générer un vidage d’archives des données, sans pour autant pouvoir les lire, les formats étant trop obsolètes. Il a donc fallu dans un second temps multiplier les manipulations afin d’ouvrir les fichiers et découvrir ce qu’ils contenaient : une véritable mine d’or !
« campbells.pic », « marilyn1.pic », « andy2.pic »… Une fois immergés à l’intérieur des fichiers, les chercheurs sont ainsi tombés sur de multiples réinterprétations numériques des œuvres emblématiques du pop-artiste. Expérimentaux et réalisés dans le plus grands des secrets, ces travaux sont pour la plupart le fruit de bidouillages des fonctionnalités de base du logiciel GraphiCraft. Si ces petits originaux (environ 300 x 200 pixels) semblent aujourd’hui accessibles à tous, rappelons tout de même que dans les années 1980, Warhol est l’un des premiers à s’emparer de ces outils de création numérique, encore peu utilisés. La preuve que le roi de la Factory, disparu en février 1987, est resté jusqu’au bout un véritable pionnier, curieux de toutes les évolutions, à l’aise dans tous les domaines !