Et si l’on vous disait que le premier métavers européen ne date pas d’il y a quelques années seulement et qu’il n’est pas non plus signé Mark Zuckerberg ? Improbable ? En 1997, la chaîne cryptée française prenait pourtant les innovations technologiques de vitesse avec Le Deuxième Monde.
Avril 1997. CANAL+ cartonne avec des programmes tels que Les Guignols de l’Info, le Vrai Journal ou encore le Zapping. Mais ce que l’on sait moins, c’est qu’à cette date, la chaîne cryptée entre dans l’histoire avec Le Deuxième Monde, soit… le premier monde virtuel en ligne d’Europe. Pour évoluer dans cet univers totalement dématérialisé, les utilisateurs sont invités à créer un avatar avec lequel ils partent à la découverte de Paris, reconstitué en trois dimensions. Ils peuvent alors rencontrer d’autres cybercitoyens, profiter de nombreux services en ligne, participer à des jeux et même y gagner de l’argent (virtuel) pour s’acheter des objets (virtuels également).
Défini à l’époque comme un jeu vidéo d’un nouveau genre, Le Deuxième Monde est plutôt à considérer comme un logiciel d’immersion dans une réalité virtuelle. À l’origine présenté sur un CD-Rom – un terme que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître – payant, il est ensuite converti fin 1998 en VRML et devient accessible gratuitement via le plugin Blaxxun. Avant même l’explosion du métavers américain Second Life, en 2003, le cybermonde de CANAL+ est l’un des premiers exemples à l’international d’une communauté en ligne simplement destinée à évoluer dans un environnement virtuel, sans but particulier à atteindre.
Un projet trop précurseur ?
Surnommés les Bimondiens, les membres de cette communauté sont également les premiers à pouvoir visiter des boutiques virtuelles, commercialisées par la régie publicitaire exclusive du Deuxième Monde, Numeriland, et spécialement conçues sur mesure afin de respecter l’identité des marques présentes dans le métavers. « En un sens, cela confirme que la VR était déjà dans toutes les têtes bien avant la démocratisation massive du web », analyse Grégory Chatonsky.
Peut-être un peu trop en avance sur son temps, le Deuxième Monde sera toutefois laissé à l’abandon en 2001 par la chaîne cryptée, avant de fermer définitivement ses portes en 2002, laissant des centaines de Bimondiens sur le carreau.